Quelle est l’intuition fondamentale qui a présidé à la fondation de la Visitation par saint François de Sales et sainte Jeanne de Chantal, en 1610 ?
Mère Marie-Blandine : La Visitation a été avant tout créée comme un ordre accessible aux petites santés : il n’y a pas de mortifications extérieures importantes. Les deux saints s’étaient en effet rendu compte qu’il y avait dans le monde des âmes désireuses de se donner à Dieu mais qui ne pouvaient entrer dans les ordres car il y avait trop d’austérités extérieures. Saint François de Sales et sainte Jeanne de Chantal mettaient au contraire l’accent sur les mortifications intérieures.
Et quelle est la grande ligne spirituelle ?
La spiritualité est, elle aussi, toute simple et repose sur l’abandon à la Providence ! Ce que saint François de Sales appelait le « bon plaisir divin ». Nous devons être prêtes à accueillir tous les imprévus, même la maladie, comme une manifestation de la volonté de Dieu. Ensuite, nos Constitutions expliquent bien le rôle que nous devons remplir : l’ordre de la Visitation a été fondé « pour donner à Dieu des filles d’oraison, si intérieures qu’elles soient trouvées dignes de l’adorer en esprit et en vérité ». Cette expression de « filles d’oraison » est capitale. Ainsi, nous passons une heure et demie par jour en oraison dans le chœur de notre chapelle, sans compter les offices. Le reste du temps, nous devons rester unies à Dieu, même en accomplissant notre travail ! Nous nous efforçons de vivre selon l’esprit de notre fondateur : « Un esprit qui ne cherche que Dieu et tend continuellement à s’unir à Lui, indépendant de tout, excepté du bon plaisir divin. […] Un esprit d’une profonde humilité envers Dieu et d’une grande douceur envers le prochain. »
Qu’en est-il de la visite aux malades ? C’est une image que l’on associe à votre ordre…
Depuis 400 ans, la même erreur court pour ainsi dire dans tous les livres ! La visite de malades, de la part de certaines Sœurs, est tout à fait secondaire par rapport à notre vie d’oraison de religieuses cloîtrées. À ce sujet, il faut rappeler que notre fondateur ne souhaitait pas une clôture, mais que cela a été une demande du cardinal de Marquemont, en application du concile de Trente. Lorsqu’il reçoit cette demande, saint François de Sales l’accepte et écrit : « Je veux que mes filles n’aient autre prétention que de glorifier [le Seigneur] par leur abaissement ; que ce petit Institut de la Visitation soit comme un pauvre colombier d’innocentes colombes, dont le soin et l’emploi sont de méditer la loi du Seigneur, sans se faire voir ni entendre dans le monde ; qu’elles demeurent cachées dans le trou de la pierre et dans le secret des masures, pour y donner à leur Bien-Aimé vivant et mourant, des preuves de la douleur et de l’amour de leurs cœurs, par leur bas et humble gémissement. » Et, contrairement à ce que l’on peut parfois lire, les visitandines ont été heureuses de ce changement qui correspondait davantage à leur attrait.
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