On n'aura jamais rien sans rien - France Catholique
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La justice de Dieu
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On n’aura jamais rien sans rien

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Zéro

C’est le nombre de séances de concertation que l’administration Obama a accordées à l’Épiscopat Américain avant « l’arrangement » de vendredi dernier, selon (hors micro) certains évêques impliqués dans l’affaire.
Drôle de façon de venir au-devant des gens.

Il ne faut pas s’étonner si, juste après la publication de l’entourloupette, les Évêques n’ont pas perdu de temps à constater que leur capacité à trouver un compromis avec le président était du même calibre que sa faculté à leur proposer un terrain d’entente.

Zéro.

Le président Obama a l’air de croire que les catholiques d’Amérique sont à la fois stupides et invertébrés. On ne peut mieux décrire la manœuvre, une mascarade présentée comme marque de tolérance envers les différents points de vue. À lire les réactions populaires aux sondages, il a peut-être raison de croire à la stupidité — même celle de catholiques. Mais tournons-nous vers les évêques Américains: le président a pointé contre eux son doigt (ou plutôt son pied fourchu), et ils n’ont ni trituré la vérité ni fui l’affrontement.

Bien sûr, ils sont dans leur droit. Mais ils peuvent être certains que M. Obama court un risque pratique, c’est-à-dire politique. On pouvait s’en rendre compte au ton coléreux et arrogant de son annonce: il était visiblement furieux de paraître forcé de reculer sur un sujet politique que même de nombreux membres de son parti et de groupes de gauche lui avaient signalé comme simplement mauvais.

Nombre d’entre eux ont remarqué qu’il n’avait pas besoin, pour commencer, de se mettre dans cette position. Mais ils se trompent là-dessus. Tout dans la façon du président d’annoncer sa décision le montre clairement.
Les Évêques disposent de solides arguments juridiques. La liberté religieuse est un droit fondamental garanti par le premier amendement à la Constitution. C’est depuis bien longtemps un des principes dont les Américains sont si fiers: nous vivons dans un pays où, dans une allocution prononcée par George Washington à la synagogue de Touro à Newport (État de Rhode Island), « la piété ne reçoit ni sanction, ni persécution, ni assistance.»

Par contraste, M. Obama a entamé son exposé en citant le « droit fondamental » des femmes à la sécurité sociale, y-compris pour la contraception, la pilule pour avortement du lendemain, et la stérilisation. Et, à propos, les femmes ont ce droit sans ticket modérateur que les assurances-maladie ont interdiction de répercuter. Y avait-il donc un droit encore plus fondamental que le droit constitutionnel à la liberté religieuse, un droit encore plus « premier » que le Premier Amendement, et que nul n’avait, semble-t-il, repéré avant vendredi dernier ?

Il existe, si on prend au mot les déclarations de M. Obama. Lui et ses nombreux soutiens en la matière ont introduit un nouvel atout dans le jeu constitutionnel, bricolage né de décennies « d’insinuations et pénombres » pour justifier la contraception et l’avortement et autres interprétations radicales des droits de la femme.

Sauf que ce qu’on considérait comme un ricochet astucieux est désormais un principe central d’interprétation constitutionnelle. Ainsi, quiconque, ou quelque groupe que ce soit, tel qu’une Église, se mettant en travers de ces nouveaux droits fondamentaux a une attitude sectaire le rejetant aux franges de l’Américanisme.

Forcé de choisir entre le Premier Amendement et un nouveau droit mijoté avec le radicalisme socialo-féministe, M. Obama a pris le parti des dames.
Nombre de commentateurs laïcs ont déclaré, bien avant cette controverse-ci, que M. Obama se sent handicapé dans la conduite d’une nation moderne par les bizarres restrictions d’un document du dix-huitième siècle. Comme, par exemple, un article qui interdit à quiconque de tyranniser le peuple. Voilà ce que c’est que vivre selon les règles de la loi et avec un gouvernement aux pouvoirs encadrés.

Il s’agit d’un document que notre naguère professeur de droit constitutionnel a juré de préserver, protéger et défendre en devenant président des États-Unis.

Laissons un instant de côté la controverse morale à propos des procédures médicales, aurait-on pu imaginer — voici seulement quelques décennies — qu’un président des États-Unis (ou son ministre de la santé et des affaires sociales — un ministère, rappelons-le, non prévu par la Constitution) aurait pensé avoir le droit de dicter à des assureurs du secteur privé les risques qu’ils doivent couvrir, et leur intimer l’ordre de fournir « gratuitement » certains services. Services tout spécialement sujets à une vigoureuse controverse.

C’est le plus lourd problème du système « Obamacare », et certains d’entre nous ont tenté d’inciter l’Épiscopat Américain à l’examiner lors des débats parlementaires sur la « réforme » du service de santé. Même à cette époque, il était évident qu’on pouvait techniquement exclure temporairement l’avortement de la couverture-santé, puis rapidement et définitivement ajourner la question, comme d’autres questions discutables, que l’échelon fédéral serait tenté accaparer.

La hiérarchie [de l’Église] comprend mieux maintenant l’enjeu de l’affrontement sur la sécurité sociale, et c’est encourageant. Si la controverse — qui ne se calme pas — amène à une meilleure réflexion de tous les Américains non seulement sur la liberté religieuse mais aussi sur le rôle et l’emprise du gouvernement [fédéral], ce sera un progrès.

Car la sécurité sociale n’est pas le seul sujet menaçant d’être centralisé au niveau fédéral. De plus en plus, l’Instruction publique et l’assistance aux pauvres — deux sujets ne figurant pas parmi les pouvoirs attribués au gouvernement fédéral — sont menacées d’entrer dans les chasses réservées du gouvernement.

Quand toutes les écoles, les hopitaux, les universités, les services sociaux, seront dirigés par le gouvernement — et non, comme selon la grande tradition Américaine, par des associations civiles comme des églises ou autres organismes indépendants — il ne faudra pas s’étonner si les gens se mettent à penser et agir comme des moutons. Ce qui a déjà commencé, aussi bien chez les catholiques qu’ailleurs.

C’est le genre de menaces fondamentales contre les libertés qui déclenche les troubles sociaux et mène aux révolutions. Que Dieu préserve notre chère Amérique d’un tel drame.


Source :

http://www.thecatholicthing.org/columns/2012/a-symposium-on-threat-to-our-religious-liberty.html

= Menaces sur notre liberté religieuse.

Trois réactions, de Robert Royal, Michael Uhlmann et Brad Miner.

NDT : La traduction des deux autres textes de la livraison du 13 février, ainsi qu’une synthèse explicative sont à venir ici-même.