Obsèques pour athée militant ! - France Catholique
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La justice de Dieu
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Obsèques pour athée militant !

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75, c’est le nombre officiel de mes années. Aujourd’hui, en la fête de saint Maurice et de ses compagnons, militaires romains martyrisés à Auganuum (Agaune), devenu depuis Saint-Maurice du Valais. Je dois être quelque peu de ses compagnons, ayant ce tempérament batailleur qui est le mien. Ce n’est pas une révélation, quelques lecteurs (rares, par bonheur) m’ont désapprouvé sur ce point : « Vous devriez être moins belliqueux, dire ce que vous dîtes avec moins de flamme, être moins emporté et donc plus doux… » Je suis incapable de me modérer : quelques minutes oui, mais pas davantage…

Une occasion pour m’améliorer s’offre à moi : la découverte de la cérémonie d’obsèques célébrée par Mgr Gaillot pour accompagner sans doute un de ses amis, un athée militant. J’ai commencé par trouver cela étrange, et peut-être scandaleux.

Est-il normal en effet qu’un athée, et qui plus est un militant de l’athéisme, voit, si j’ose l’écrire, son cercueil être reçu dans une église – pas un tout petit sanctuaire de rien du tout, caché en pleine campagne, une chapelle du temps des croisades perdue au plus profond d’une forêt, non, mais dans la plus vaste église de Paris après Notre-Dame, où l’orgue est le plus impressionnant de France et peut-être d’Europe ou du monde, c’est-à-dire en somme reçu exemplairement, avec faste, comme pour bien affirmer que l’Église universelle l’admet solennellement en son sein comme elle ne le fait plus pour ses fils baptisés ! Mais pourquoi ? Afin que ses obsèques couronnent sa « conversion » ? Sa demande de pardon pour tout le mal qu’il a pu lui faire ? Car je suppose que le célèbre généticien d’extrême-gauche Albert Jacquard, avant de mourir a dû éprouver l’immense et fabuleux désir de remettre de l’ordre dans ses convictions si diverses, et qu’il n’a pu que faire appel à un prêtre pour avouer qu’il reconnaissait Jésus, le Christ, pour celui qu’Il est et pour ce qu’Il accomplit depuis deux mille ans, afin d’être en mesure de faire valoir le baptême de son enfance et son repentir et donc son droit de recevoir le pardon de Dieu ? Je l’imagine, en tout cas… Mais avait-il réellement été baptisé ? Et s’était-il vraiment converti ? Est-ce que sa célébrité suffisait à remplacer l’acte de foi ? La machine en question est en route.

Mgr Jacques Gaillot (dont on ne sait pas s’il croit vraiment en la résurrection mais je ne puis supposer un seul instant qu’il ait abandonné l’essentiel de la foi), Mgr Jacques Gaillot a donc célébré les obsèques de celui qui tout au long de sa vie a nié Dieu, son Fils et sans doute également le Saint-Esprit. Cela s’est passé en présence de nombreux activistes d’extrême gauche : notamment Jean-Baptiste Eyraud, porte-parole du DAL (Droit au logement), l’actrice Josiane Balasko, le communiste Jack Ralite, Alain Krivine, Bertrand Delanoë, l’ancien ministre socialiste Louis Besson et bien d’autres : sans doute quelques adhérents du Grand Orient de France. En somme que du beau monde, tous gens constellés d’intentions admirables et de beaux sentiments, en somme meilleurs que moi : je souhaite de tout mon cœur, car ils le méritent, comme de toute mon âme, et même de mon pauvre esprit, que cette foule de gens résidant habituellement hors de l’enceinte du Corps mystique se soient soudain découverts comme « amis du Christ », comme hommes et femmes remplis de l’Esprit-Saint, tels les apôtres le jour de la Pentecôte ; si, par bonheur, tel est le cas, il serait normal que nous en soyons avertis, car si tel n’est pas le cas, ce qui est après tout possible, cette cérémonie pourrait apparaître comme scandaleuse et leur présence une hypocrisie. (S’il y a soupçon d’ironie dans mes propos, c’est qu’il m’est alors impossible de les supprimer.)

En effet, étant donné le lieu, la solennité de ces obsèques, il aurait paru naturel que l’Église de France informât l’ensemble de ceux qui la fondent, la constituent, c’est-à-dire au moins l’ensemble des baptisés de Paris et même de France, que désormais ils auraient droit à un prêtre et à une célébration eucharistique, la messe quoi !, pour les accompagner jusqu’au-delà du portail d’entrée tenu par saint Pierre… Puisque cela ne se peut plus pour le vulgus pecus… Je n’oublie pas la mésaventure de Maurice Courant, sa fête aujourd’hui, quand il fallut l’accompagner : vingt moines des abbayes de Bellefontaine et de Notre-Dame de Fontgombault se proposaient de célébrer tous ensemble une messe pour l’aider nç franchir le seuil de la Porte étroite, cela leur fut interdit parce que tout privilège ne peut qu’être interdit : et la messe célébrée eut constituée un tel privilège.

S’il n’y avait pas eu ce concours de personnalités brillamment antichrétiennes, la présence de l’évêque de je ne sais plus quel diocèse saharien – car enfin l’événement n’est pas passé inaperçu ! – je ne me serais par permis d’ergoter et de pinailler… mais là, devant ce fait qui me semble l’un des plus considérables du moment présent, je crois indispensable que nous soient données des explications : nous y avons droit, même moi qui suis, depuis le 19 avril 1939, inscrit comme membre du Corps du Christ sur les registres de la paroisse de Saint-Cloud !

Jusqu’ici, il fallait donc compter sur deux règles : un athée ne pouvait prétendre à des obsèques chrétiennes puisque non chrétien. De plus hostile publiquement au christianisme ; les morts n’ont plus droit qu’à une cérémonie sans prêtre et dirigée par un laïc !

Ou bien, à St-Sulpice, il y a eu abus de confiance ou bien il y a eu aveu de foi : en somme retour du fils prodigue chez le Père éternel. On peut ici faire une halte pour nous souvenir de ce qui advint à Rome au pauvre Ratisbonne, qui n’en pouvait plus de besogner en vue de détruire la réputation de la Vierge Marie ; à Paul Claudel derrière un pilier de Notre-Dame de Paris, diplomate en danger, en plein triomphe du scientisme ; André Frossard, qui rencontre Dieu dans une petite chapelle rurale où il s’était arrêté par hasard… Est-ce cela qui est advenu au pauvre Albert Jacquard ?

Autre hypothèse : monseigneur Gaillot aurait-il abusé le curé de St-Sulpice ? Lui aurait-il fait confidence d’un événement qui n’aurait pas eu lieu ? Sinon, aurait-il demandé le secret, mais pourquoi ? Aurait-il agi seul ?

On ne peut pas laisser l’événement inexpliqué : puisqu’il ne peut se comprendre s’il n’existe pas au moins une raison majeure d’avoir enfreint le règlement qui s’impose à tous.

« L’humain d’abord, c’était son credo », a souligné dans son homélie le célébrant. Ah ! Nous en sommes ravis et même davantage ! Mais est-ce que cela suffit pour que l’on ouvre tout en grand les trois portails de St-Sulpice ? Le Credo normalement demandé est plus riche de sens : je ne croirais pas en l’homme si d’abord je ne croyais pas en Dieu. À la vérité, l’homme en lui-même me serait totalement, disons presque totalement indifférent si Dieu était réellement et totalement absent comme le pensait Albert Jacquard. L’amour tel que nous l’enseigne Jésus me paraîtrait une dérision étant donné l’étroitesse de la prison du temps. Et je serais probablement une larve spirituelle, un nul absolu, un égoïste de première, un coureur de dames appartenant au genre mufle et grossier. Etc.. Je n’ose même pas penser au désastre intérieur dans lequel j’aurais été plongé et qui aurait exigé en ma faveur une vigoureuse intervention divine…

Donc, et j’insiste, il faut que soit donnée une raison éclairante sur cette cérémonie qui semble sans justification. Certes, il est possible qu’elle ait déjà été donnée : peut-être en toute discrétion, en catimini, dans le silence ouaté de la vaste sacristie de ce sanctuaire. Mais il faut que même la discrétion soit abolie parce qu’il y va de la crédibilité de notre Église.

Ni plus ni moins…

http://www.esprit-et-vie.com/breve.php3?id_breve=164

Hommage à Albert Jacquard