« L’Europe n’est pas chrétienne. Je ne crois pas aux racines chrétiennes de l’Europe. » C’est Pierre Moscovici, ancien ministre français et actuel commissaire européen, qui a fait cette déclaration pour le moins surprenante, dimanche dernier sur la chaîne de télévision BFM TV. Une telle négation de l’histoire ne s’explique que par de solides préjugés idéologiques. « Commençons par écarter tous les faits, car ils ne touchent point à la question. » La formule fameuse de Jean-Jacques Rousseau correspond assez exactement à l’état d’esprit de l’idéologue enfermé dans sons sytème. D’ailleurs, Pierre Moscovici a prononcé le mot fétiche qui définit sa conception de l’Europe et sa philosophie politique : progressisme. Le progressisme ainsi entendu exige une sorte d’amnésie, un arasement du passé. Du passé faisons table rase, chante-t-on dans L’internationale.
Oh, sans aucun doute, Pierre Moscovici ne saurait être suspect de léninisme ou de stalinisme. Sa filiation sociale-démocrate ne fait aucun doute, même si elle est problématique, alors que la mondialisation entraîne des remaniements théoriques qui valent parfois reniement de l’ancien socialisme. Peut-être l’intéressé pourrait-il illustrer son progressisme en se réclamant de Marcel Gauchet. La modernité européenne serait la conséquence directe de la sortie de la religion, et le progressisme, précisément, désignerait l’émancipation de la cité par rapport à l’emprise ancienne du christianisme de type médiéval. Oui, mais justement, cette sortie de la religion n’a été possible que par la médiation du christianisme. Marcel Gauchet le dit en propres termes : le christianisme est la religion de la sortie de la religion. En d’autres termes, sans christianisme, ni modernité, ni progressisme.
Pierre Moscovici ne veut pas le reconnaître, car ce serait admettre une dette et une certaine forme de reconnaissance à l’égard d’un patrimoine, fut-il émancipateur. Sans compter que l’émancipation en question n’a rien à voir avec le nihilisme. Il y a bel et bien métamorphose, mais celle-ci n’a été possible et ne reste possible que par la Révélation qui nous dit « Ecce homo ». Voici l’homme, sa liberté, sa dignité, à l’encontre de toutes les dérives, notamment progressistes de la modernité.