Obama réélu, faut-il dire que les choses sérieuses reprennent ? Tocqueville s’effrayait déjà de ces périodes électorales trop fréquentes, où la société est entretenue, disait-il, dans un mouvement fébrile et où les affaires publiques sont dans un état de versatilité continuelle. Le président réélu n’a pas caché, dans son discours de Chicago, les défauts des joutes partisanes, mais c’était pour en appeler immédiatement à la fierté américaine qui consiste dans la continuité d’une histoire initiée par les Pères fondateurs. C’est vrai qu’il avait besoin d’en appeler à l’unité et à la cohérence de la nation. En saluant son adversaire, il ne répondait pas seulement à un réflexe de courtoisie, il abandonnait les habits du candidat pour revêtir à nouveau ceux du Président, en charge de la nation toute entière et déjà soucieux de ses prochaines négociations avec une Chambre des représentants restée républicaine.
En regagnant la Maison-Blanche pour son second mandat, Barack Obama retrouve tous les dossiers qu’il n’avait, à vrai dire, jamais abandonnés mais qui s’étaient comme estompés dans le climat des joutes oratoires. Ces dossiers nous les connaissons bien d’ailleurs, car ce sont aussi les nôtres : endettement considérable de l’État, chômage massif, désindustrialisation, régulation des flux migratoires… Sans compter qu’en dépit de la crise, l’Amérique demeure cette superpuissance en charge des équilibres mondiaux. Le Président pourra-t-il modifier enfin la donne dans le conflit israélo-palestinien, pourra-t-il intervenir avec plus de succès dans les pays musulmans, en donnant enfin à son fameux discours du Caire les prolongements diplomatiques incontestables ? Et puis il y a le terrible dossier afghan. Pourra-t-il rapatrier ses troupes sans laisser tout le terrain aux talibans, alors que ceux-ci lui demandent de reconnaître sagement sa défaite ?
Et puis il y a le véritable partenaire qu’est la Chine, puisque les Chinois sont les créditeurs de l’économie américaine. Partenaires et en même temps rivaux, voulant affermir leur leadership en Asie, au risque d’un affrontement avec le Japon. Obama réélu, ce ne sont pas seulement les États-Unis, c’est le monde entier qui se tourne vers le fameux Bureau ovale, s’interrogeant non sans angoisse sur la stratégie que le Président va déployer pour maîtriser une situation périlleuse.