Le discours que le président Barack Obama a prononcé, lundi dernier, à Hanovre en Allemagne, compte sans doute d’ores et déjà parmi les plus importants de ses deux mandatures. Peut-être le comparera-t-on à celui qu’il avait prononcé au Caire, le 4 juin 2009, sur le thème « les États-Unis ne seront jamais en guerre contre l’islam ». Il s’agissait de redéfinir la politique américaine à l’égard du monde musulman, en tenant compte des graves erreurs qui avaient été commises, notamment en Irak. Cette fois-ci, il s’agissait de l’Europe et de son avenir, qui inquiète quelque peu le président, eu égard à la nécessaire solidarité que les États-Unis se doivent d’entretenir avec notre continent. Visiblement, le texte avait été très travaillé, associant des considérations générales à des paroles propres à toucher les Européens aussi bien dans leur ensemble que dans leurs appartenances nationales. La réouverture du Bataclan a même été évoqué, comme si Obama voulait faire vibrer les cordes les plus sensibles.
Mais dans quel dessein ? Celui de réconforter l’Union européenne et d’inciter les partenaires à tenir ferme à leurs engagements et à leur projet commun. Obama n’ignore pas les facteurs de perturbation qui fragilisent la construction européenne et il tient à rappeler ce qui a été accompli et ce qui ne doit pas être compromis. La chancelière Angela Merkel n’a pu qu’être sensible à ces encouragements ; ils s’adressaient directement à elle. Le président américain a même fait un éloge très appuyé de sa personne et de son action. Nul doute, également, que les autorités de Bruxelles n’aient reçu avec gratitude un tel message. Il n’est pas sûr pour autant qu’Obama ait répondu aux nombreuses objections dont la politique bruxelloise est en ce moment l’objet.
Car l’Europe est remise en cause par les peuples qui la composent, mais aussi dans ses objectifs et son fonctionnement. Ainsi par Marcel Gauchet, avec sa redoutable intelligence critique, dans son dernier essai. Gauchet évoque même la possibilité d’un effondrement par délitement intérieur dans une situation de blocage. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a plus d’espoir de ce côté. Simplement, il conviendrait de reprendre un examen complet du projet dans ses conditions actuelles de réalisation. Les Américains n’ont peut-être pas encore intégré cette nouvelle problématique.