Il semble que toute une mobilisation déclenchée contre la menace du retour du racisme en France n’ait pas obtenu les résultats que ses responsables escomptaient. Il y a peut-être une raison essentielle à cet échec : nos concitoyens n’apprécient nullement qu’on instrumentalise une cause morale pour discréditer l’adversaire politique, et ils savent très bien que quelques faits isolés, aussi condamnables soient-ils, ne justifient pas une incrimination massive du peuple français. Pierre-André Taguieff, qui est l’universitaire français le plus instruit de la question du racisme et de l’anti-racisme, a donné à l’hebdomadaire Le Point un entretien où il fait justice de la campagne actuelle : « Ce qui se banalise en France, ce n’est pas le “racisme”, qui tout au contraire s’est débanalisé dans la période post-nazie, ni “la parole raciste”, qui n’a jamais cessé de se raréfier à chaque génération, depuis qu’elle est devenue socialement visible et culturellement identifiable, et bien sûr condamnable. Dans le paysage médiatique français, ce qui frappe, c’est la banalisation de l’indignation, qui est pour beaucoup une indignation de complaisance et de convenance. Une indignation antiraciste aussi consensuelle qu’hyperbolique, mue par une surenchère permanente. Mais une indignation sélective, visant un petit nombre de cibles, toujours les mêmes. » Et Pierre-André Taguieff de conclure : « L’indignation convenue meurt des effets de sa monotonie. »
Que l’on ne s’y trompe pas pourtant ! S’il n’y a pas lieu de se laisser piéger par l’indignation convenue, il n’est pas question pour autant de ne pas prendre garde à des faits réels, insupportables, condamnables, mais qui ne sont nullement imputables à un peuple français dont l’inconscient serait infecté de racisme. Lorsqu’on déplore la recrudescence des actes antisémites, on rechercherait en vain une responsabilité générale. Il importe au contraire de bien discerner en quoi ces actes sont liés à une propagande particulière, très ciblée, qui se distingue des motifs d’un ancien antisémitisme, devenu à peu près obsolète. De même, ceux qui sont les plus prompts à dénoncer le retour du racisme et la libération de la parole raciste sont complètement indifférents aux actes sans cesse renouvelés de profanations de tombes chrétiennes et de saccages d’églises. Pourtant, il s’agit d’un phénomène beaucoup plus répandu que celui que l’on fustige à l’enseigne de l’islamophobie.
Chrétiens, nous ne cherchons pas à nous faire passer pour des victimes et à accuser indistinctement une opinion nullement coupable. Nous pourrions mettre en cause certains médias experts en anticléricalisme et en phobie de l’Église catholique, mais nous craindrions d’être injustes. Il vaut infiniment mieux tâcher de rester lucides et de raison garder en toute occasion.
Pour aller plus loin :
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