Mission, caractère et institutions - France Catholique
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Marie dans le plan de Dieu
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Mission, caractère et institutions

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Un ami disait l’autre jour : « Les libéraux bâtissent des institutions, les conservateurs ne le font pas. » Maintenant, je ne peux pas dire que je crois cela entièrement vrai, mais il faisait valoir un argument intéressant. Les libéraux, disait-il, savent comment bâtir des institutions ; ils les établissent et les protègent ; ils se battent pour elles ; et sans honte ni regret, ils se débarrassent de quiconque n’est pas dévoué à la mission ou l’idéologie à laquelle ils sont fidèles. Au final, les libéraux – ou si vous préférez les « progressistes » – ont été efficaces pour prendre le contrôle ou récupérer un large éventail des institutions américaines, depuis les principaux médias et universités jusqu’aux conseils d’entreprise et à l’entière industrie des loisirs.

Vous avez peut-être remarqué, sur le plan ecclésial par exemple, que lorsque un évêque libéral prend en charge un diocèse ou qu’un prêtre libéral prend en charge une paroisse, ils se débarrassent plutôt rapidement de ceux qui ne sont pas « en phase » avec leur idéologie et ils recrutent des personnes qui le sont. Ils interviennent comme si leur tâche principale était d’« occuper la place » et non de promouvoir les bonnes qualités déjà présentes. Ils ont rarement scrupule à virer des gens ayant par ailleurs de superbes qualifications parce que la qualification primordiale, pour eux, est l’adhésion à l’idéologie. Et promouvoir les buts du « mouvement » est toujours plus important que permettre à des employés de longue date de garder leur boulot.

Les conservateurs, c’est à mettre à leur crédit, ne sont pas susceptibles d’agir ainsi. Des évêques conservateurs sont souvent accablés durant des décennies par des membres libéraux de leurs propres services qui font des choses qu’ils désapprouvent. Et pourtant les évêques conservateurs sont souvent réticents à virer de telles personnes. « Il est ici depuis longtemps » disent-ils. « Il a charge de famille ; vous ne pouvez pas le virer comme cela ». Ce à quoi on pourrait répondre : « eh bien, évêque, peut-être que vous, vous ne pouvez pas. Mais vos collègues libéraux font toujours ainsi ».

Il est difficile de critiquer quelqu’un qui a des scrupules à « faire le ménage » pour des raisons idéologiques, mais il est important de noter que le résultat est un effet cliquet qui va toujours dans la même direction. L’autre déplorable résultat est celui-ci : cela prend des années et des années pour construire une institution de qualité vouée à l’excellence. Mais il ne faut que deux ou trois ans à un administrateur idéologue incompétent pour la détruire.

Donc reconnaissons pour le moment le véritable défi que constitue, pour un administrateur doté de scrupules, faire le ménage des fonctionnaires de son prédécesseur libéral, mais il y a également des administrateurs conservateurs qui répugnent à faire des vagues. Ils ne veulent pas « perturber ». Ils ne veulent pas faire face au retour de bâton pour s’être séparés de subordonnés qui sont devenus populaires auprès des progressistes, même quand ces personnes se sont montrées de façon répétée indignes de confiance.

Il y a aussi quelques conservateurs qui, en raison de leurs dispositions conservatrices, traitent l’embauche comme si ce n’était qu’une question de méritocratie. Ils se disent : « nous allons chercher ‘les meilleurs’, indépendamment de la mission ». Et ils embauchent des gens qui haïssent la mission de l’institution et la minent constamment.

J’ai des amis et collègues conservateurs qui considéreraient déchoir si jamais ils embauchaient ou seulement recommandaient un ami conservateur qu’ils connaissent et auquel ils font confiance. Ils croient que chacun doit seulement déposer sa candidature et que le comité de sélection choisira la personne la plus qualifiée. J’ai une large expérience des comités d’embauche, et cette supposition est la plus idiote et naïve imaginable.

Les libéraux progressistes voteront chaque fois pour des libéraux progressistes parce qu’ils sont fidèles à modeler l’institution à leur image et que l’idéologie prime toutes les autres considérations. Les conservateurs tendent souvent à être individualistes et de ce fait, en matière d’embauche, cela peut les rendre insensibles à l’aspect construction de l’institution. Ils se posent rarement des questions telles que : « Comment pouvons-nous constituer une équipe efficace ? Comment cette personne va-t-elle évoluer comme partie d’une plus grande structure institutionnelle ? Que signifie cette embauche pour l’avenir de l’institution ? »

J’ai un jour entendu, lors d’une conférence, un PDG couronné de succès déclarer : « Nous embauchons toujours en fonction du caractère. Vous pouvez former des compétences, vous ne pouvez pas former des caractères ». Ses plus grandes erreurs, disait-il, était lorsqu’il avait embauché des gens dont le caractère et le dévouement pour la mission de la compagnie n’étaient pas clairs mais dont il était difficile de résister aux talents et à la formation. Cela avait été chaque fois une erreur. Soit ils avaient lésiné ou pris des raccourcis ayant coûté à la société argent ou réputation, soit ils avaient sévèrement miné le moral de leur entourage professionnel.

Embaucher pour une mission n’est pas la même chose qu’embaucher pour une idéologie. Quand vous embaucher pour une idéologie, vous ne vous souciez pas de respectabilité. Les gens peuvent mentir, tricher, voler – peu importe – aussi longtemps qu’ils promeuvent l’idéologie. C’est pourquoi Bill Clinton est toujours honoré à la Convention Nationale des Démocrates et Andrew Cuomo toujours gouverneur de New-York, même si chacun sait qu’ils sont tous deux harceleurs en série. [NDT : l’article a été écrit avant la démission de Cuomo]

Pour embaucher pour une mission, vous devez avoir déterminé clairement quelle est la mission (ce que certains ne font pas). Et ensuite vous avez besoin d’embaucher des gens qui vont poursuivre la mission avec caractère. Le caractère importe autant sinon plus qu’une prétendue expertise technique.

Les conservateurs n’ont pas besoin de « nettoyer la maison » des libéraux pas plus que les institutions catholiques n’ont besoin de « nettoyer la maison » des non-catholiques. Beaucoup de non-catholiques sont plus dévoués à la mission catholique en lettres et sciences sociales et humaines de leur université que des catholiques étiquetés tels. De même, beaucoup de libéraux sont de vrais libéraux, avec du caractère, qui croient à la libre pensée et à la libre expression et sont ouverts à la discussion.

Mais si en embauchant vous pensez traiter avec une méritocratie individuelle, vous vous égarez. Les libéraux progressistes embauchent des libéraux progressistes. Point, à la ligne. Je ne suis pas en train de suggérer que les conservateurs fassent de même en retour et n’embauchent que des conservateurs en se basant sur leur idéologie. Mais les institutions conservatrices peuvent et doivent améliorer leur embauche pour leur mission. Et elles doivent penser davantage à bâtir des institutions qui incarnent cette mission plutôt que simplement faire confiance à une méritocratie individualiste illusoire qui n’existe que dans leur imagination.