Les temporalités se recoupent, sans coïncider. La temporalité liturgique n’est pas la temporalité politique. Mais le fait d’être chrétien n’exclut pas du tout le fait d’être citoyen. Il nous faut donc vivre la Grande semaine de l’année, tout en suivant la campagne électorale, ce qui n’est pas si évident. Car pour être en pleine adhésion avec les mystères que nous commémorons, il faudrait être en état de disponibilité intérieure parfaite, avec le congé donné aux soucis de ce monde. Mais ceux-ci se chargent bien de nous rattraper. Alors, il faut trouver la bonne mesure, l’accommodement raisonnable. Heureusement, il est possible de choisir des moments pour s’abstraire du vacarme, ne serait-ce qu’en saisissant sa Bible ou son missel. Et puis il y a le refuge des sanctuaires pour les grands offices. Alors, là nous changeons vraiment de temporalité.
Avec plusieurs milliers de fidèles du diocèse de Créteil, j’ai fait cette expérience dans le Palais des sports de la ville, mardi soir à l’occasion de la messe chrismale. Pour la circonstance, ce palais avait été transformé en cathédrale, la vraie cathédrale toute neuve d’ailleurs toute proche de là, ne pouvant accueillir pareille foule, en dépit de ses belles dimensions. Oui, c’était vraiment une autre temporalité, l’espace liturgique nous faisant plus que symboliquement pénétrer dans un autre temps, un autre climat, un autre imaginaire. Une magnifique chorale nous y aidait puissamment et la ferveur des participants autour de leur évêque, Mgr Michel Santier, et de son presbyterium, signifiait une adhésion intérieure et unanime à cette cérémonie des huiles saintes qui renvoyait à la force sacramentelle de l’Église. Notre cité n’est pas seulement d’ici-bas, mais, comme le dit l’apôtre, elle est céleste.
La cérémonie s’est terminée d’une façon étonnante, une fois la bénédiction de l’évêque répandue sur l’assemblée. Celle-ci s’est transformée en une houle de joie, tous applaudissant et chantant à tue-tête, pour manifester leur bonheur d’être ensemble et d’avoir vécu pareil événement. Une houle de joie particulièrement impressionnante parce que la diversité des visages se fondait dans une communion sans mélange.
Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 13 avril 2017.
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