Le cardinal André Vingt-Trois a prononcé hier son ultime discours d’introduction en tant que président de la conférence des évêques de France. On retrouve dans son texte les qualités qu’il a toujours manifestées dans ses différentes responsabilités : sagesse, équilibre, profondeur. Je ne dis pas cela en vertu d’une quelconque situation qui m’imposerait de défendre l’institution ecclésiale. Fondamentalement attaché à l’Église et d’abord à son mystère, je ne suis pas un courtisan. Je garde ma liberté d’appréciation, notamment en tant qu’observateur dans le domaine de l’information religieuse.
Ce n’est pas un poste de tout repos que celui de chef de file de l’épiscopat. Je conserve quelques souvenirs mémorables, notamment celui du cardinal Albert Decourtray déjà en pleine tempête. À la veille d’une émission télévisée importante, je lui avais rendu visite dans sa résidence de Fourvière. Il s’attendait à un rude combat, à des sondages, me disait-il, catastrophiques, pour l’Église, mais il ne céderait rien. De fait, présent sur le plateau de l’émission, je constatais qu’il faisait front de toute sa foi, mais aussi de toute sa lucidité, qui était grande.
Le cardinal Vingt-Trois n’a pas toujours eu à naviguer sur une mer étale. J’ai beaucoup apprécié la façon dont il avait agi dans l’affaire du mariage dit « pour tous », sans élever le ton mais avec une détermination que rien n’est venu entamer. Il y eut notamment cette prière du 15 août pour la famille, qui fut au principe d’une véritable mobilisation spirituelle. Beaucoup prirent conscience que l’avenir de la famille était en jeu et qu’il convenait de s’engager totalement dans un combat essentiel. Bien sûr, il y avait la distinction des domaines et des tâches. Ce n’est pas le Cardinal qui organisait les manifestations, il en laissait l’initiative à de libres citoyennes et citoyens. Mais il encourageait, il approuvait, refusant une attitude de retrait, qui n’aurait pas été cohérente avec sa mission. En tant que pasteur, il avait à approfondir la doctrine du mariage et de la famille, en renvoyant les consciences à une maturité intérieure. Ainsi qu’il l’a fait encore hier dans son intervention : « La pointe du combat que nous avons à mener n’est pas une lutte idéologique ou politique. Elle est une conversion permanente pour que nos pratiques soient conformes à ce que nous disons. » Merci, monsieur le Cardinal !