En son autobiographie, Thérèse d’Avila parle de Pierre d’Alcantara comme d’« un saint et un homme de grand esprit ». De famille aisée, il entre à 16 ans chez les franciscains après des études à Salamanque. Au cœur de la réforme franciscaine d’Espagne et du Portugal, d’une austérité légendaire, il fut surtout un grand pédagogue spirituel à travers son Traité de l’Oraison et de la Méditation, très proche de celui de son ami Louis de Grenade, le maître dominicain.
Faire l’expérience de Dieu
Habituellement, l’itinéraire spirituel commence par une phase durant laquelle on réfléchit beaucoup : la méditation, qui permet de prendre conscience de la présence aimante de Dieu, laquelle nous éveille à un amour réciproque pour lui. Cet éveil associe un attachement volontaire, l’affection, à une perception tout intérieure, le sentiment, ces deux mots n’ayant chez les spirituels d’avant le XVIIIe siècle que peu de nuance sentimentale : il ne s’agit pas d’une impression de Dieu, mais de l’expérience même de Dieu qui vient en moi. Arrive un moment où l’amour se met à croître sans aucun effort mental, à proportion de notre silence intérieur : voilà la contemplation. Elle vaut par elle-même, devient reposante, évidente dans « une simple vue de la vérité ».
Abandon à la présence divine
Le seul effort du contemplatif doit être alors de laisser tomber tout ce qui n’est pas cette évidence de la présence divine. Tout comme il suffit au petit enfant de savoir que sa mère est là pour s’abandonner à elle dans un amour total : même si « notre entendement ne peut presque rien connaître de Dieu », cela suffit pour que « la volonté puisse beaucoup l’aimer ». Ce mouvement est celui du recueillement, c’est-à-dire de l’accueil de Dieu qui arrive par « le centre de l’âme », à partir duquel il envahit peu à peu l’âme tout entière au fil de la croissance spirituelle.
Cette évidence de la présence de Dieu tend à la pure transparence, au point que l’âme parfaite prie sans avoir conscience de prier, tout comme nous voyons sans avoir conscience de la lumière.
La vie spirituelle ne cesse d’aller et venir entre méditation et contemplation, même si la part de celle-ci tend ordinairement à augmenter, avec toujours plus de « lumière, plénitude, charité et paix », et pour autant toujours moins de mots, car cette « paix qui excède tout sentiment » (Ph. 4, 7), « les paroles ne peuvent pas l’expliquer ».
Pour aller plus loin :
- Vladimir Ghika : le contexte politique avant la guerre de 1914-1918
- La France et le cœur de Jésus et Marie
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- Jean-Paul Hyvernat
- La paternité-maternité spirituelle en vie monastique est-elle menacée en Occident ?