Stratégies de la tension, disais-je hier. Nous y sommes plus que jamais. De part et d’autre on sait qu’on joue gros dans cet affrontement. Les syndicalistes font savoir qu’il faut distinguer l’action de protestation contre la réforme du système des retraites, des actions inconsidérées des casseurs ! Ils savent très bien que l’opinion publique supporte vraiment mal la violence et que lorsque celle-ci s’ajoute à la perspective d’une paralysie de l’activité, il y a possibilité d’un retournement psychologique. Jusqu’ici tous les sondages ont indiqué que les Français soutenaient massivement la contestation. Mais on est pas à l’abri d’une exaspération populaire contre la violence, à l’image de ce qui s’était passé en 1968.
Vétéran de cette époque, si j’ose dire, j’ai une mémoire assez précise du processus qui s’est alors déroulé. Au début de la contestation étudiante et des manifestations du quartier latin, l’opinion regardait avec une certaine tendresse sa jeunesse braver l’autorité de l’Etat, incarné alors par le général De Gaulle. Mais après plusieurs semaines de paralysie totale du pays, l’opinion s’était retournée considérant le ressaisissement de l’autorité publique comme une délivrance. Le Général, en procédant à la dissolution de l’Assemblée Nationale, allait obtenir une majorité parlementaire massive, en écrasant toute opposition.
Je ne prétends nullement qu’un tel phénomène se reproduira; mais les différents responsables savent qu’il n’est pas improbable. Bernard Thibaud et François Chérèque feront tout pour garder la maitrise de leur mouvement afin de ne pas perdre l’appui de l’opinion.
Chronique lue sur Radio Notre-Dame le 20 octobre