Je lis toujours avec autant d’intérêt les chroniques religieuses et profanes de France catholique.
Je tiens cependant à vous dire mes réserves sur votre journal du n°3127 au sujet de Cohn-Bendit.
« Il ne faut pas prendre les canards sauvages pour les enfants du Bon Dieu » avait dit alors le général de Gaulle. Je crains que vous ne le fassiez.
Ayant vécu Mai 68 aux premières loges (Faculté de Nanterre), je ne pense pas que le Mouvement du 22 mars était moins dépendant des idéologies que les autres. En réalité, ce n’était pas un mouvement de plus mais une sorte de coordination informelle où se retrouvaient des dirigeants trotskistes, maoïstes, PSU, UNEF etc. avec quelques transcourants comme Daniel Cohn-Bendit peut-être chargés de manipuler les autres (au bénéfice de qui ? Je vous le laisse à deviner).
Il est faux également que « le gauchisme s’émancipe d’une certaine matrice idéologique dure ». Le terme de gauchisme appliqué par le parti communiste aux mouvements d’extrême-gauche reprenait une expression de Lénine. Et les « gauchistes », pour qualifier le PC, reprirent eux aussi une formule de Lénine, celle de « révisionnistes », que Lénine appliquait à la social-démocratie. Je ne sais pas ce qu’étaient en soi les gauchistes mais eux se voulaient encore plus durs que le PC. Se référant, qui à Trotski, qui à Mao, ils ne remettaient nullement en cause le totalitarisme, ils trouvaient au contraire que le PC et l’URSS ne l’étaient plus assez ! Le mot de totalitarisme était d’ailleurs inconnu d’eux ; il appartient au vocabulaire libéral d’Arendt et Aron, un courant totalement vilipendé par les soixante-huitards.
Les maoïstes reprochaient même au PC de ne plus être stalinien.
Qu’il y ait eu par derrière d’autres courants : chrétiens du PSU ( fort sectaires eux aussi ) , anarchistes ( très peu visibles) , libertaires ( moins importants qu’on ne l’a dit) ou simples réformateurs de l’Université, certes mais ceux qui étaient le fer de lance du mouvement , les trois composantes trotskistes, les maoïstes, l’UNEF, étaient marxistes-léninistes, idéologues, manipulateurs, excitant sans cesse à la haine du capital , de la bourgeoisie et du policier.
Cohn-Bendit ne m’a jamais paru quelqu’un de sympathique. Son apologie de la pédophilie dans les années 70, ses attaques ignobles contre les catholiques polonais au Parlement européen en font quelqu’un de détestable. Je ne me suis trouvé d’accord avec lui que dans sa récente algarade à Sarkozy au sujet du Tibet.
A la différence d’un Régis Debray ou d’un Alain Finkielkraut, c’est quelqu’un qui déteste tout ce que vous représentez.
Bien fraternellement,
Roland