La presse et les médias ont salué unanimement la mort de Lucien Neuwirth, défini comme « le père de la pilule ». Faut-il remarquer que ce qualificatif est en soi complètement inadéquat ? Ce n’est pas l’homme politique, celui qui a fait voter la loi autorisant la contraception en 1967, qui est à l’origine de ce qu’on appelle généralement « la pilule », mais un scientifique américain, Gregory Goodwin Pincus, qui était par ailleurs médecin et biologiste. Il s’agissait au départ d’un médicament qui permettait de soigner les dérèglements hormonaux de certaines patientes. Ce n’est que par la suite qu’elle devint le moyen efficace d’une véritable révolution contraceptive, qui devait modifier les attitudes sociales devant la sexualité et devant la vie tout court.
Lucien Neuwirth est, aujourd’hui, loué, je le répète, unanimement pour avoir, dit-on, libéré les femmes d’une fatalité qui les enchainait depuis toujours. À peu près aucun contradicteur n’est venu entamer un consensus absolu. On peut présumer que celui qui avait néanmoins une objection à présenter s’est soigneusement retranché dans son quant à soi, par peur d’être ridiculisé ou fusillé à bout portant. Il serait aussi ridicule ou mal séant de contester la pilule que l’invention de la pénicilline, ou même de l’aspirine ! On m’a pourtant glissé subrepticement dans ma boîte de courriel une chronique iconoclaste, assez féroce je l’avoue, qui a le mérite de faire au moins réfléchir. J’en cite ce seul extrait : « Selon l’inspection générale des affaires sociales, la prise de pilule pendant la durée de la vie féconde représente l’ingestion au quotidien de plus de 8000 comprimés. Avec la dose d’hormones de synthèse en proportion. Ami du bio et de la nature, bonsoir. »
Voilà de quoi refroidir un peu l’enthousiasme général, sans compter que la contraception pose des problèmes spécifiques qu’il faudrait avoir la liberté d’aborder avec la distance nécessaire. Mais encore un mot sur Lucien Neuwirth. Sa biographie révèle un extraordinaire baroudeur, une vie étonnante qu’il serait dommage de réduire à un seul de ses épisodes, celui-ci fut-il emblématique.
Chronique lue sur Radio Notre-Dame le 28 novembre 2013.
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