Le Président de la République provoque ce qu’il est convenu d’appeler un beau tollé à gauche suite aux propos qu’il a tenus devant le congrès de l’Association des maires de France. En reconnaissant un droit à l’objection de conscience des maires qui récuseraient le soi-disant mariage pour tous, François Hollande est venu troubler son propre camp. Les dirigeants du lobby gay sont vent debout contre ce qu’ils considèrent être un déni de la promesse qui leur a été faite. Et ils sont rejoints par le parti communiste, les verts, le parti de gauche et nombre de socialistes qui ne s’y reconnaissent plus. Certes, le projet de loi demeure inchangé, du moins dans sa disposition centrale comme ouverture du mariage aux homosexuels. Si la loi est votée, le dit mariage devra être célébré et acté en mairie. Mais ceux qui expriment leur mécontentement n’ont pas tort de s’étonner de l’exception que le président a semblé préconiser à propos de l’obligation d’obéir à la loi. Bien sûr, devant la révolte des siens, François Hollande a reculé, il a désavoué son recours à la liberté de conscience. N’empêche que la question est posée et qu’elle le restera.
Il n’est pas d’exemple analogue, me semble-t-il, en ce qui concerne les maires 1. Peut-être pourrait-on invoquer le cas des médecins qui se refusent à pratiquer des avortements et dont la liberté de conscience est bel et bien garantie par la loi. Je laisse aux juristes et aux constitutionnalistes le soin de trancher. Mais sur le terrain de la philosophie générale, comment sous-estimer la question de l’obligation de conscience dont le déni pose des problèmes extrêmement graves. On me dit qu’au Canada, où le mariage homosexuel est entré dans le droit selon une procédure très différente, un magistrat municipal ne peut être contraint à l’encontre de ses convictions.
Dans l’immédiat il apparaît que François Hollande est lui même en proie à un problème de conscience. Les choses sont en train de bouger, pas seulement à la suite des manifestations de samedi qui ont changé la donne. Un président, qui est en charge de l’unité morale du pays, peut-il prendre le risque d’une déchirure grave sur un sujet pareil ? En son temps, François Mitterrand répétait qu’il s’agissait pour lui de convaincre et non de contraindre. Son successeur peut-il envisager de contraindre les consciences, faute d’avoir convaincu ?
Chronique lue sur Radio Notre-Dame le 22 novembre 2012.
- Même si on me signale des cas bien particuliers : un maire laissant un adjoint célébrer le mariage de son ancienne femme avec son ex-meilleur ami… comme quoi il y a déjà possibilité pour un maire d’échapper à la célébration d’un mariage même valide…
Pour aller plus loin :
- « Quelle liberté de conscience pour les maires ? »
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