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Liban

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Liban : l’irrésistible ascension du Hezbollah

par Jean Étévenaux (© acip)

Les présentations des médias mettant sur le même plan Hezbollah et majorité parlementaire libanaise ne doivent pas cacher la gravité de la situation au pays du Cèdre. Un groupe minoritaire est en train de grignoter petit à petit le pays avec l’aide décisive de ses alliés iranien et syrien. Et tout ceci s’effectue au détriment de la majorité d’un pays qui ne veut pas voir revenir les luttes de factions et qui croit à l’ouverture et à la tolérance.

Dernière grande force politique à s’organiser au Liban, le Hezbollah jouit d’une extraordinaire popularité depuis deux ans. Après s’être attribué le mérite de l’évacuation du Sud-Liban par Israël en 2000, il a réussi, six ans plus tard, à lui tenir tête, ce que son leader Hassan Nasrallah a transformé en grande « victoire divine » – terme constituant opportunément l’exacte signification de son patronyme ! Surtout, il en a retiré une aura plus générale, car, comme l’a écrit l’an passé Gérard de Villiers dans Rouge Liban, il a « remplacé Oussama Ben Laden dans le cœur des sunnites ». En d’autres termes, quoique appartenant à la minorité chiite théoriquement méprisée et même combattue par la majorité sunnite – comme l’ont montré les récents combats entre milices sunnites et chiites à Beyrouth -, il est celui sur lequel se sont concrètement transférées toutes les frustrations et toutes les espérances de ceux qui ne rêvent que de la destruction d’Israël. Il appuie sa force sur une nouvelle forme de clientélisme, différente des pratiques claniques libanaises, mais au moins aussi efficace : il accorde à tous ses affidés et sympathisants une assistance très concrète.
Le Hezbollah est devenu un État dans l’État. D’abord, il contrôle des zones, notamment à Beyrouth et à Tripoli, dans lesquelles règne son ordre, avec son propre système de sécurité – comme l’a éprouvé récemment ce représentant du parti socialiste français enlevé quelques heures puis relâché sans explication. Ensuite, il a des agents à lui et des sympathisants actifs qui le renseignent utilement. Enfin, plus récemment, il a mis en place des infrastructures parallèles à celles de l’État libanais susceptibles de prendre son relais le moment venu. On vient ainsi de découvrir son système propre de télésurveillance à l’aéroport de Beyrouth – et un autre au niveau national.

Tout cela dément les affirmations constamment répétées d’Hassan Nasrallah, qui prétend ne rien vouloir faire contre l’État libanais. En réalité, c’est lui qui non seulement n’hésite pas à porter le fer et le sang au sein de la population libanaise mais qui bloque le système institutionnel : avec ses alliés – dont le général chrétien Michel Aoun, ancien champion de ceux qui refusaient la mainmise syrienne, mais aussi des sunnites du Nord, des alaouites proches du président syrien et la milice Amal du président du Parlement Nabih Berri, mouvement dont est issu Hassan Nasrallah -, il empêche depuis plus de six mois l’élection du nouveau président de la République et le fonctionnement du gouvernement. Aujourd’hui, malgré les condamnations de l’Onu, il a franchi une nouvelle étape en s’en prenant directement à d’autres Libanais.