Elle m’avait fait venir en sa petite ville mais en sa grande et belle église abbatiale pour que j’y installe l’exposition sur le Linceul de Turin ; je ne me souviens plus exactement de l’année : ce fut celle d’une canicule très dure ! Mais j’ai gardé un magnifique souvenir de ce mois passé là-bas, pays si beau, si hors du temps !
Il y a quelques jours, elle avait transmis sur son réseau une copie de mon texte Crime d’état et reçu des commentaires plutôt agréables dont celui de François Xavier Sinniger, très intéressant même si encore moins indulgent que le mien.
J’envoyais aussitôt une réponse à Marie Christine.
« Ah mais ! Cette ‘’réponse’’ de François Xavier Sinniger est excellente ! Plume efficace en outre. Vous avez bien fait de me communiquer son texte.
Quelques remarques, à la hâte parce qu’au-delà de onze heures du soir je commence à avoir sommeil.
Il est bien vrai que l’on ne peut exprimer tout ce que l’on aimerait dire dans un article qui doit paraître dans un journal. Ce qui n’empêche pas que je suis moi aussi persuadé que la République est, au plus profond d’elle même un monstre et qu’elle l’est aussi fatalement que Satan n’est que haine. Il faut aux hommes qui l’incarnent une singulière vertu pour parvenir à garder malgré elle sagesse et mesure. Le texte cité de Mgr Gaume est là-dessus parfaitement éloquent.
Cependant, elle n’est pas que cela car le plus souvent on la voit servie par d’honnêtes représentants qui ne savent quasi rien des références de la Dame et qui cherchent, autant que cela soit possible, la justice, le droit, la compassion et le bien … Pas toujours efficacement il est vrai…
… Si le baptême du régime en 1789 fut de sang, ce régime ne peut poursuivre sa route que dans le sang, dans l’obscurité des possibles et parfois dans le réel. Là, dans cette boue rouge à Paris et tant d’autres villes où traînent encore le souvenir des têtes coupées, ce fleuve à Nantes qui se gorgea de cadavres, ces chenins creux de Vendée et ces rues de villages où s’entassèrent les pauvres corps de femmes et d’enfants massacrés par-dessus ceux de leurs maris et pères, se trouvent les signes et symboles d’un péché d’origine jamais jusqu’ici avoué dans les larmes comme il eut convenu que cela fut fait. Au contraire, nos misérables responsables politiques se taisent – crime de ‘’mémoricide’’ selon Reynald Secher, historien – et préfèreraient disparaître sous terre plutôt que d’avouer l’origine de leur pouvoir et sa nature. Mais, car il y a un mais, l’homme, sous quelque régime que ce soit, peut très aisément devenir un monstre avide du cœur et de l’âme de ses semblables. Le roi Louis IX fut un saint, mais combien le furent dans la longue liste de ceux qui « firent la France » ? Que de crimes furent également commis sous ces règnes … qui pourtant nous ont portés dans la gloire d’une foi chrétienne maintenue ?
J’ai longtemps pensé que la monarchie était la seule solution possible : maintenant, je n’ose même plus penser que, par nous-mêmes, nous soyons capables de retrouver le chemin des sources : seul un miracle venu du Père, du Fils et de l’Esprit Saint serait en mesure de ressusciter ce pauvre pays qui fut Fille ainée de l’Eglise. Et si j’ose croire que ce miracle surviendra, c’est bien parce que Marthe Robin l’a annoncé, disant qu’après être descendue « au plus bas », « la France redeviendrait une lumière pour le monde ». Mais avons-nous vraiment atteint ce « plus bas » ?J’ai parfois l’impression que le gouffre de l’histoire est sans fond … à l’échelle de notre vie.
L’espérance ne se découvre pas dans la sagesse des hommes, j’entends ceux qui détiennent les pouvoirs, elle se découvre dans la parole du Christ : et cette espérance nous parle davantage du Royaume que des affaires terrestres, même s’il nous est possible de tirer de cette parole une ‘’sagesse’’ bienheureuse qui pourrait nous assurer un gouvernement qui ne soit pas l’incarnation de la honte.
Ah ! tout de même, c’est moins dans les constitutions que se trouvera, s’il doit être trouvé, le salut politique de notre pays, c’est dans le retour à la foi et dans l’idéal chrétien qu’affirmeront nos futurs représentants, c’est dans leur capacité à choisir toujours le bien plutôt que la mode que se fera concrètement le renversement de la Révolution, que sera remplacée cette Révolution ‘’renversante’’ par une dynamique de renouvellement dans la fidélité et l’amour : qui lui n’est jamais effacement, renversement, destitution …
Etc..
C’est assez pour ce soir, l’horloge de mon ordi marque qu’il est bientôt minuit moins quinze minutes. »
En fait il était minuit un quart…
« Il faut, ajoute François Xavier Sinniger, que l’auteur – donc moi – ouvre entièrement la porte d’acier qu’il a réussi à débloquer, mais dont les ressorts sont tellement puissants qu’elle peut se refermer implacablement, écrasant les doigts et les membres, en récusant le terme de « nouveau type de république ».
Non, « Il n’y a pas de nouveau type républicain », et il n’y en aura jamais : la République est. Oui c’est la fille de la révolution au sens transcendant du terme, et c’est là que ces paroles de Mgr Gaume peuvent être méditées : « Si, arrachant son masque, vous lui demandez : qui es-tu ? Elle vous dira : ‘’Je ne suis pas ce que l’on croit. Beaucoup parlent de moi et bien peu me connaissent. Je ne suis ni le carbonarisme… ni l’émeute… ni le changement de la monarchie en république, ni la substitution d’une dynastie à une autre, ni le trouble momentané de l’ordre public. Je ne suis ni les hurlements des Jacobins, ni les fureurs de la Montagne, ni le combat des barricades, ni le pillage, ni l’incendie, ni la loi agraire, ni la guillotine, ni les noyades. Je ne suis ni Marat, ni Robespierre, ni Babeuf, ni Mazzini, ni Kossuth. Ces hommes sont mes fils, ils ne sont pas moi. Ces choses sont mes œuvres, elles ne sont pas moi. Ces hommes et ces choses sont des faits passagers et moi je suis un état permanent.
» Je suis la haine de tout ordre que l’homme n’a pas établi et dans lequel il n’est pas roi et Dieu tout ensemble. Je suis la proclamation des droits de l’homme sans souci des droits de Dieu. Je suis la fondation de l’état religieux et social sur la volonté de l’homme au lieu de la volonté de Dieu. Je suis Dieu détrôné et l’homme à sa place (l’homme devenant à lui-même sa fin). Voilà pourquoi je m’appelle Révolution, c’est-à-dire renversement… »1
Et je reprends, que cite François Xavier Sinniger, à mon compte ce que le Pape Saint Pie X 2 avait dit à un groupe de nouveaux cardinaux français :
« Que vous dirai-je maintenant à vous, chers Fils de France, qui gémissez sous le poids de la persécution ? Le peuple qui a fait alliance avec Dieu aux fonds baptismaux de Reims se repentira et retournera à sa première vocation. Les mérites de tant de ses fils qui prêchèrent la vérité de l’Évangile dans le monde presque entier et dont beaucoup l’ont scellée de leur sang, les prières de tant de saints qui désirent ardemment avoir pour compagnons dans la gloire céleste les frères bien aimés de leur patrie, la piété généreuse de tant de ses fils qui, sans s’arrêter à aucun sacrifice, pourvoient à la dignité du clergé et à la splendeur du culte catholique, et, par-dessus tout, les gémissements de tant de petits enfants qui, devant les tabernacles, répandent leur âme dans les expressions que Dieu met sur leurs lèvres, appelleront certainement sur cette nation les miséricordes divines. Les fautes ne resteront pas impunies, mais elle ne périra jamais, la fille de tant de mérites, de tant de soupirs et de tant de larmes. Un jour viendra, et nous espérons qu’il n’est pas très éloigné, où la France, comme Saül sur le chemin de Damas, sera enveloppée d’une lumière céleste et entendra une voix qui lui répétera : ‘’Ma fille, pourquoi Me persécutes-tu ?’’ Et sur sa réponse : ‘’Qui es-tu Seigneur ?’’ la voix répliquera : ‘’Je suis Jésus, que tu persécutes. Il t’est dur de regimber contre l’aiguillon, parce que, dans ton obstination, tu te ruines toi-même.’’ Et elle, tremblante et étonnée, dira : ‘’Seigneur, que voulez-Vous que je fasse ?’’ Et Lui : « Lève-toi, lave-toi des souillures qui t’ont défigurée, réveille dans ton sein les sentiments assoupis et le pacte de notre alliance, et va, Fille aînée de l’Église, nation prédestinée, vase d’élection, va porter, comme par le passé, Mon nom devant tous les peuples et devant les rois de la terre. » À quoi il est bon d’ajouter une autre des citations de la même réponse :
« C’est une réécriture de l’histoire qu’il faut opérer, c’est vers la constitution de l’ancienne France échafaudée depuis le baptême de Clovis à Reims en 496 qu’il faut se retourner, c’est la proclamation de Christ-Roi dans les institutions qu’il faut souhaiter de tout cœur: ‘’Si le moment du règne de la royauté du Christ n’est pas encore venu, alors Sire, n’est pas encore venu le moment des gouvernements de durer’’ »3.