Lors de la première affaire où la Cour Suprême énonça une série d’avis (Chisholm contre l’État de Géorgie, 1793) James Wilson insista pour que la loi en Amérique ne soit pas fondée, comme en Angleterre, sur l’idée qu’un supérieur, un souverain, émette des directives. « Si on remontait à l’origine du souverain, on trouverait un être humain, — disait-il — quelqu’un acceptant les conditions du gouvernement auquel il était soumis.» Et pourtant, comme disait Wilson, l’autorité suprême répondrait parfaitement à la définition « d’Être suprême », introuvable parmi les humains « où n’existe ni supériorité ni dépendance.»
Wilson, immigré d’origine Écossaise, s’installa à Philadelphie et devint un des esprits majeurs dans ce cercle des « Fondateurs ». Et il y définit la notion des droits naturels: aucun homme n’est par nature le chef d’autres hommes, comme par nature Dieu a autorité sur les hommes, et les hommes ont par nature autorité sur les chevaux et les vaches. Si on trouve des hommes exerçant un pouvoir sur d’autres hommes, ce n’est pas naturel. Il faut établir ce pouvoir par convention et consentement.
Selon cette interprétation, il serait aussi mauvais d’ici cent ou mille ans que des humains soient dominés de la même manière que les humains dominent les chevaux ou les vaches. Le droit accordé aux gouvernements de gouverner « avec l’accord du peuple » durera autant que dureront ces différences de nature. Les droits ainsi énoncés sont, selon Lincoln, « propres à tous les hommes, et en tous temps. »
Mais si vous avez ces droits naturels, à partir de quand en jouissez-vous ? Wilson l’expliquait bien ains : ces droits commencent dès qu’on commence à être. La loi étendrait donc sa protection tout au long de la vie « dès que l’enfant peut remuer dans le sein de la mère.» Cet enfant en sa mère serait « non seulement protégé de destruction immédiate mais… en certains cas de toute forme de danger. »
Ce n’est pas une grande nouvelle pour nos lecteurs que rappeler ma participation de bien des années à un projet pour préserver et, souvent, rétablir ce sens des droits issus de la loi naturelle qui marquait la génération des Pères Fondateurs.
Nombre de nos amis raniment la vieille opposition entre la loi naturelle et les droits naturels. Thomas Hobbes rappelle que « le droit donne la liberté d’agir ou de s’abstenir, alors que la Loi le définit et le met en application.
En d’autres termes, les « droits » concernent les libertés, alors que les « lois » ont trait aux devoirs. Mais tant pour les Pères Fondateurs que pour la population, parler de loi naturelle signifiait parler de vérités morales objectives incrustées dans toute nature durable. Ainsi, si nous devons « ne pas tenir pour fautifs des gens pour des actes qu’ils étaient dans l’impossibilité d’empêcher,» il devrait y avoir un « droit » correspondant à être tenu pour innocent. Mais il importe plus que jamais de laisser les mots céder la place à la substance morale des principes qui nous sont enseignés.
Au cours de ces deux dernières années j’ai travaillé à lancer un nouveau projet sur la loi naturelle, sous le nom de James Wilson, un maître qui n’a pas reçu l’hommage ni l’attention mérités. Nous avons donc désormais l’Institut James Wilson sur les Droits Naturels de la Fondation de la Nation Américaine, dont le siège est à Washington. Nous avons organisé. des séminaires, et en projetons d’autres.
Deux fois l’an, ces dernières années, nous avons rassemblé d’éminents professeurs de philosophie et de droit pour cerner les principes de la loi naturelle applicables aux affaires soulevées par nos lois. Plusieurs de nos amis juges fédéraux, ont participé à nos débats. Ils ont pris le problème au à sa juste mesure, sachant combien la question est sérieuse, et ils n’ignorent pas que la loi naturelle a été repoussée aussi bien à gauche qu’à droite par des juristes comme par des juges. À gauche par rejet des vérités morales, et à droite, par crainte des réactions des juges gauchistes devant des lois plus détaillées que la Constitution. Leur crainte provient de leur incapacité à voir que la loi naturelle est fondée sur les canons de la raison et de la vérité.
Ce n’est pas une mince affaire que lutter contre les tendances actuelles, et de remettre dans l’enseignement ce que juristes et juges savaient bien naguère. Mais si nous devons le faire, allons-y dès maintenant.
Source : The James Wilson Seminars in Natural Law http://www.thecatholicthing.org/columns/2014/the-james-wilson-seminars-in-natural-law.html
Photo : Le Professeur Arkes traitant des Droits Naturels lors de la fondation des USA devant un auditoire de l’Institut James Wilson.
Pour aller plus loin :
- Affaire Ulrich KOCH contre Allemagne : la Cour franchit une nouvelle étape dans la création d’un droit individuel au suicide assisté.
- Le défi du développement des peuples et le pacte de Marrakech - la fuite en avant des Nations Unies
- Le cardinal Müller sur les questions des droits
- Sur le général de Castelnau et le Nord Aveyron.
- Édouard de Castelnau