Qui sont-ils, ces « guetteurs de l’Éternel » ?
Albéric de Palmaert : Ce sont tout simplement les seconds rôles de l’Évangile, ceux qu’on ne voit pas tout de suite. Quand on lit l’Évangile on se trouve en face de nombreux personnages. Il y a les grands sur lesquels on s’arrête à chaque fois et puis il y a les moins grands, les seconds rôles. Bien plus nombreux, mais moins connus et tellement proches de nous. J’irai même jusqu’à dire que l’Église est faite de seconds rôles. Parmi eux il y a d’abord Théophile, à qui Luc destine ses écrits, l’Évangile et les Actes des apôtres ; le jeune garçon qui possède cinq pains et deux poissons ; le porteur d’eau qui va mener les apôtres au cénacle ; les Grecs de passage à Jérusalem ; et tant d’autres… Ils ne font que passer mais ils sont ceux dont, tout compte fait, on peut se sentir très proches. Ne sommes-nous pas nous-mêmes en effet très souvent les seconds rôles ?
Que nous apportent-ils aujourd’hui ?
Ils nous permettent de nous resituer à notre vraie place face à l’Évangile. Ils nous font entrer dans l’Histoire, ils nous ouvrent la porte. Il y a un passage que j’aime beaucoup et qui m’a souvent accompagné dans l’écriture de ces méditations, c’est celui de la rencontre avec la femme que Jésus rabroue. En Matthieu 15, « Il n’est pas bien de prendre la nourriture et de la donner aux chiens », lui dit Jésus quand celle-ci lui demande de guérir sa fille. « C’est vrai, Maître, répond-elle, pourtant même les chiens mangent les morceaux qui tombent de la table de leur maître. »
Nous sommes très souvent dans la situation de cette Cananéenne. Nous sommes les petits chiens, et pourtant Jésus est attentif à chacun d’entre nous, même quand nous ne sommes pas certains d’être dignes de sa grâce et de son amour. Ces seconds rôles ce sont aussi ces scènes de fond d’écran, les images lointaines qu’on ne voit pas tout de suite, ce sont des phrases souvent passées sous silence parce qu’écrasées par des mots plus forts, plus connus… Beaucoup de lecteurs seront surpris et se demanderont parfois si ces personnages sont vraiment dans le texte de l’Évangile. Rassurez-vous, ils y sont !
Vous vous adressez à eux comme à des compagnons, voire des frères…
Oui, parce qu’ils sont nos frères et qu’ils nous ouvrent le chemin. Le premier d’entre eux est celui que nous appelons « le bon larron » dont on ne sait rien non plus. Ils sont tellement proches de nous que nous pouvons souvent nous assimiler à eux.
Tous ces guetteurs de l’Éternel sont un petit peu liés à France Catholique.
Bien sûr ! Disons qu’ils sont tous passés dans ses pages ! En effet, le livre reprend les chroniques que j’ai eu le bonheur de donner à France Catholique durant des années avec quelques ajouts et compléments, et aussi une mise en forme par chapitres, et non plus en fonction des lectures du dimanche. Et, curieusement, nous avons pu constater une réelle cohérence entre ces personnages. Il y a une forme d’histoire, de continuité qui se dégage. C’est le miracle de l’Évangile qui est toujours nouveau et personnel.
— Albéric de Palmaert, Guetteurs de l´Éternel. Méditations avec les seconds rôles de l’Évangile, Éditions Ontau, 2019, 12,50 €.
— Albéric de Palmaert, Guetteurs de l´Éternel. Méditations avec les seconds rôles de l’Évangile, Éditions Ontau, 2019, 12,50 €.