Les philosophes qui ont permis à Hitler de réussir - France Catholique
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Funérailles catholiques : un temps de conversion
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Les philosophes qui ont permis à Hitler de réussir

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On pense quelquefois qu’Hitler n’était qu’une simple brute, mais il a affirmé que la lecture de Fichte, Nietzsche, Kant, Hegel, Schopenhauer, Darwin, et Heidegger «m’a fourni les matériaux et les plans dont je me suis servi plus tard… et une philosophie qui est devenue la fondation de granit de toutes mes actions futures. »

Dans un nouveau livre important, Les philosophes d’Hitler, Yvonne Sherratt étudie la vulgarisation par Hitler de différents philosophes modernes et les universitaires distingués qui ont soutenu le Führer et le National Socialisme.

Pour justifier sa Weltanschauung (« vue du monde »), tordue, Hitler a choisi des passages dans les écrits de ses héros philosophes. Son ami d’un temps, Ernst Hanfstaengl, disait qu’Hitler « n’était pas tant un distillateur qu’un barman de génie. Il a pris tous les ingrédients que la tradition germanique lui offrait et les a mélangés selon son alchimie particulière en un cocktail qu’ils désiraient boire. »

De Nietzsche, Hitler a appris à détester la démocratie parce qu’elle « encourage la médiocrité. » Il admirait l’esprit guerrier de Nietzsche et son appel à la violence à des fins politiques : « La brutalité est respectable… Le terrorisme est absolument indispensable dans tous les cas où il s’agit de la fondation d’un nouveau pouvoir. »

Il a adopté l’idée de Nietzsche qu’ « une culture doit encourager non l’égalité mais la grandeur » et « créer des conditions qui demandent des hommes plus forts. » Hitler a cherché à produire des surhommes aryens qui pourraient régner sur le monde.

De Hegel Hitler a pris les concepts que l’Etat possède un pouvoir suprême sur l’individu et que le progrès historique exige le conflit. Hitler pensait que la « force dans l’histoire » de Hegel s’appliquait au peuple allemand, et il justifiait « l’invasion de l’Europe en utilisant les idées historiques d’ ‘arrivée à l’existence’ de Hegel.

Hitler acceptait Kant parce que, concluait-il, « le plus grand service que Kant nous a rendu…  est l’entière réfutation de l’enseignement qui était l’héritage du Moyen Age et de la philosophie dogmatique de l’Eglise [Catholique].

Hitler « était aussi attiré par l’opinion de Kant selon laquelle le Judaïsme était superstitieux et irrationnel : « la religion juive n’est pas vraiment une religion du tout, mais simplement la communauté d’une multitude d’hommes de la même tribu. » Y. Sherratt fait remarquer que Kant « déclarait en fait que la moralité pure voulait ‘l’euthanasie du Judaïsme.’ »

Avec Fichte, Hitler a appris l’exceptionnalisme et le nationalisme allemand, et il était d’accord avec la déclaration de Fichte : « Je ne vois absolument aucun moyen de donner aux Juifs des droits civils. »

Quant à Schopenhauer, Hitler se vantait, « j’ai emporté les ouvrages de Schopenhauer avec moi pendant toute la première guerre mondiale. Il m’a beaucoup appris, » apparemment qu’il « glorifiait la volonté plus que la raison. »

Hitler a mis tous ces petits morceaux de philosophie au service du darwinisme social. Il maintenait que seuls les bien-portants avaient le droit de survivre : « La grande multitude ne fait partie que de la nature… Ce qu’ils veulent, c’est la victoire des plus forts et l’annihilation ou la reddition sans condition des plus faibles. » Ces prétendues lois de l’humanité ne s’appliquent pas à l’homme : « [il] vit ou il est capable de rester au-dessus du monde animal, mais malheureusement en utilisant les méthodes de lutte les plus brutales. » «  Seule la force règne. La force est la première des lois. » Seul « l’homme le plus fort a raison. »

Quand Hitler est devenu Chancelier allemand, un grand nombre de savants respectés en philosophie, droit, et sciences l’ont accepté. Ils « ont collaboré avec enthousiasme pour donner au régime nazi une couverture de respectabilité. »

Le plus éminent était Marin Heidegger, l’auteur de Etre et Temps, et l’une des figures centrales de l’existentialisme. Après avoir quitté un séminaire jésuite, Heidegger a étudié sous le grand phénoménologue Edmund Husserl qui s’est arrangé pour qu’il obtienne sa chaire de philosophie à l’Université de Fribourg en 1928.

En mai 1933, des semaines après s’être inscrit au parti Nazi, Heidegger a été nommé Recteur de l’Université de Fribourg et dans son discours d’inauguration il a fait l’éloge du National Socialisme et a fait le salut nazi.

Dans le journal de l’Université il écrivit à la fin de 1933 :

Que votre courage grandisse sans cesse pour vous sacrifier pour le salut de l’être essentiel de la nation et l’augmentation de sa force la plus profonde dans son régime… le Führer lui-même et lui seul est la réalité germanique, le présent et, et sa loi… Heil Hitler.

Il a publié le Décret de Baden qui renvoyait les professeurs non-aryens de l’Université. Son mentor, Edmund Husserl fut une des victimes de ce décret.

Heidegger a aussi insisté pour que soit créée une chaire d’études des races et de génétique et « recommandé que ‘pour préserver la santé de l’Etat’ la question de l’euthanasie soit sérieusement envisagée. »

Y. Sherratt observe judicieusement : « Heidegger avait aidé à glorifier le Führer. Il avait fourni le glaçage sur le gâteau du rêve de Hitler ; car le surhomme intellectuel nazi était là aux yeux de tous. »

Après le suicide du Führer-philosophe en 1945, les collaborateurs-philosophes ont couru se cacher. Avec l’aide de leurs collègues universitaires, ils ont dissimulé leurs activités et ignoré le passé : « Un voile de silence est descendu sur les salles des universités. »

Heidegger n’a même jamais condamné l’Holocauste ; il a simplement comparé la perte des vies juives à celles des Allemands tués au combat. » Quand on insistait pour qu’il se repente, il se plaignait « que Hitler l’avait laissé tomber. ‘Hitler va-t-il s’excuser auprès de moi ?’ »

Cependant Hannah Arendt, une de ses anciennes étudiantes, et Jean-Paul Sartre, ont protégé la réputation de Heidegger. Il fut renommé professeur à l’Université de Fribourg en 1951 et on le considère encore comme l’un des plus grands philosophes du vingtième siècle. Y. Sherratt fait remarquer que l’admiration pour les qualités intellectuelles « pèse davantage que le dégoût que l’on pourrait avoir pour les qualités morales. »

Son excellent livre se termine cependant sur une note troublante mais presciente. Tandis que les systèmes politiques et gouvernementaux allemands étaient dénazifiés, on n’a pas assez exposé, effacé ou condamné les idées fondamentales de l’Etat nazi. « Sans vigilance, demande-t-elle, des paroles ambigües ne pourraient-elles pas masquer les préjugés, et les germes de la philosophie de Hitler se propager aux nouvelles générations ? »

Elle a raison. Le manque de vigilance a rendu puissants les promoteurs de la Culture de la Mort, qui a recommandé avec succès des méthodes telles que l’euthanasie en les appelant actes de compassion. C’est ironique puisque de tels actes ont été condamnés aux procès de Nuremberg comme crimes contre l’humanité.

Les intellectuels sont encore attirés par de nombreuses autres notions mortelles héritées plus ou moins du siècle dernier de pensée « avancée », dont la moindre n’est pas un matérialisme grossier qui, plus que jamais, nécessite un examen minutieux.


George J. Marlin est éditeur de The Quotable Fulton Sheen/Citations de Fulton Sheen, et l’auteur de The American Catholic Voter/ L’électeur américain catholique. Son livre le plus récent est Narcissist Nation : reflections of a Blue-State Conservative/Nation narcissique : réflections d’un Etat conservateur.

Source : http://www.thecatholicthing.org/columns/2013/hitlers-philosophical-enablers.html