Les nouveaux saints canadiens - France Catholique
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Marie dans le plan de Dieu
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Les nouveaux saints canadiens

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Le 3  avril 2014, le pape François a canonisé François de Laval (fêté le 6  mai) et Mère Marie de l’Incarnation (fêtée le 30 avril). Ces deux premiers saints de la ville de Québec ont été canonisés en même temps que l’« apôtre du Brésil », le jésuite José de Anchieta (fêté le 9 juin). Les trois nouveaux saints avaient été béatifiés, déjà en même temps, par Jean-Paul II, le 22  juin 1980. Une messe d’action de grâce présidée par le pape François, sera célébrée à Rome le 12  octobre. Un pèlerinage de Canadiens aura lieu en France et en Italie, à partir du 5  octobre. Nous avons interrogé, au Québec, Louise Gosselin, supérieure générale des ursulines 1, Marie-Berthe Demers, vice-postulatrice pour la cause de Marie de l’Incarnation, et Doris Lamontagne2, organisatrice du voyage.

Qui était François de Laval ?

Doris Lamontagne : François de Laval naît le 30 avril 1623 à Montigny-sur-Avre en France. Il a six frères et deux sœurs. La famille n’est pas riche mais vit surtout des revenus de la seigneurie de Montigny.

Dès l’âge de huit ans, il entreprend des études chez les jésuites au collège de La Flèche et, dix ans plus tard, au collège de Clermont à Paris. Il est ordonné prêtre le 1er mai 1647, à l’âge de vingt-quatre ans. De 1654 à 1658, à l’Ermitage de Caen en France, il se forme à une vie de prière et de charité intense selon la spiritualité d’abandon prônée par Pierre de Bérulle.
François de Laval est sacré évêque de Pétrée à l’abbaye Saint-Germain-des- Prés de Paris, le 8 décembre 1658. Dès son arrivée en Nouvelle-France, il devient l’artisan de fondations importantes : le Séminaire de Québec en 1663, le Petit Séminaire en 1668. En 1664, il fonde la première paroisse de la colonie, Notre-Dame-de-Québec, qui deviendra le siège de la première cathédrale en Amérique du Nord. L’immense diocèse de Québec (qui va jusqu’au golfe du Mexique) est érigé le 1er octobre 1674 et il en est le premier évêque.

François de Laval se fait proche des malades et des pauvres. Il effectue quatre visites pastorales de son diocèse pendant son ministère épiscopal. Sur sa route, il s’arrête pour bénir les familles. Il s’oppose au commerce de l’eau-de-vie entre les colons et les Amérindiens, bataille qui occasionne des désaccords majeurs avec le gouverneur.

Éprouvé par la maladie, il démissionne en 1668 et passe les vingt dernières années de sa vie, retiré au Séminaire de Québec.
La quête de cohérence caractérise la vie d’abandon de François de Laval. La singularité et la simplicité de son expérience sont parfois désarmantes. Elles rediront peut-être que la sainteté n’est pas le lot de quelques personnes, mais bien l’affaire de tout croyant ou croyante qui ose accueillir la mouvance de la grâce et de l’Esprit de Dieu. L’Esprit nous fait devenir enfants de Dieu ; et nous le sommes dans le Fils unique.

Qui était Marie de l’Incarnation ?

Louise Gosselin o.s.u. : Elle s’appelait Marie Guyart, par sa naissance, le 28 octobre 1599, à Tours en France. Elle sera madame Martin par son mariage et, veuve à 19 ans, deviendra Marie de l’Incarnation en prenant l’habit chez les ursulines de Tours en France. Un nom porteur de sa spiritualité et de sa mission.

Quand elle débarque à Québec, toute première religieuse missionnaire ici, le 1er août 1639, Marie de l’incarnation est à la veille de ses 40 ans. C’est une femme mûrie par ses expériences humaines et spirituelles.

C’est à la lecture des Relations ou récits des jésuites du Canada que Marie de l’Incarnation a ressenti un vif désir de venir en Nouvelle-France, malgré tout ce qui est dit alors de ce pays effroyable. Elle vient y consumer sa vie, comme elle dit, pour que les gens de ce pays, particulièrement les peuples autochtones, trouvent un sens à leur vie… Elle y consacre les trente-deux dernières années de sa propre vie, jusqu’à sa mort à Québec, le 30 avril 1672, après avoir laissé à ce pays et à cette Église un immense héritage dont nous vivons toujours.

On peut lire (encyclopédie Wikipe­dia) que Bossuet l’appelait la « Thérèse de la Nouvelle France » et que sa figure a été popularisée par l’abbé Henri Brémond 3? A-t-elle été oubliée entre-temps ?

Sœur Marie-Berthe Demers : En tout cas, Marie de l’Incarnation a toujours été vivante chez nous… et n’a pas connu les oubliettes au Canada.
Dans les annales de son monastère, on lit que, dès sa mort, on a voulu conserver le rayonnement de son visage. Le gouverneur de Callières et l’intendant Talon, en accord avec les religieuses, ont ressorti le corps de Mère Marie de son tombeau afin de conserver les empreintes de son visage.
Dès que son fils, le bénédictin Dom Claude Martin, eut appris son décès il s’est empressé de publier sa correspondance puis a écrit la vie de sa mère avec le rayonnement que l’on connaît ! On a tout de suite colligé la documentation requise afin que sa cause de sainteté soit reconnue à Rome. Mais ce n’est qu’en 1877 que le dossier a été accepté par la Congrégation pour la Cause des saints.

Et seulement en 1911 qu’elle a été déclarée vénérable, i. e. que « ses vertus ont été déclarées vécues à un haut degré d’héroïcité ». Il a encore fallu attendre jusqu’en 1980 pour que Jean-Paul II la déclare bienheureuse et Mère de l’Église au Canada. On s’est rappelé alors en effet que le père jésuite Charles Lalemant d’abord, puis Bossuet, l’appelaient la « Thérèse de la Nouvelle-France ».

Comment situer la canonisation de Marie de l’Incarnation par rapport à celle de François de Laval ?

Sœur Marie-Berthe : Il y avait dejà vingt ans que Marie de l’Incarnation œuvrait avec ceux qu’elle appelait les « ouvriers de l’Évangile » : récollets, jésuites et augustines, lorsque le premier pasteur est arrivé. La décision était bien ancrée dans leurs esprits de ne pas enseigner le français aux « sauvages », mais d’apprendre leurs langues : le huron, l’algonquin, l’iroquois et le montagnais. D’où les dictionnaires qui ont été préparés et remis aux missionnaires…

L’annonce du mystère du Salut se faisait par la catéchèse aux petites séminaristes mais aussi au Parloir à tous ceux qui se présentaient.
Voici, deux volumes que je recommande : Marie de l’Incarnation, par Fran­çoise Deroy-Pineau, éd. Beauchemin, 1999 ; Marie de l’Incarnation, femme d’affaires, mystique, mère de la Nouvelle-France, par Françoise-Renée Deroy-Pineau, aux éd. Robert Laffont, 1989.

Des Canadiens se préparent à célébrer les nouveaux saints à Rome…

Doris Lamontagne : Ce pèlerinage depuis Québec débutera le 6 octobre par une messe en l’église Saint-Germain-des-Prés, à Paris. Le 7 octobre, les pèlerins se rendront à Montigny-sur-Avre. Le 8, ils seront accueillis au collège du Prytanée à La Flèche et par les moines de Solesmes. Le jeudi 9 octobre, ils seront à Tours et feront une visite de la chapelle Saint-Michel et de la Petite Bourdaisière, les deux bâtiments primitifs des ursulines de Tours où est entrée Marie de l’Incarnation en 1631. Elle y vivra huit années avant de partir pour le Canada. Le groupe reviendra ensuite à Paris pour prendre un vol à destination de Rome et participer à la messe d’action de grâce avec le pape François…

  1. Les ursulines, filles de sainte Angèle Merici, sont aujourd’hui environ 16 000.

    On distingue les ursulines de droit pontifical :

    – 22 instituts : 11 500 religieuses,

    – 37 maisons autonomes : 1 800 religieuses ;

    et les ursulines de droit diocésain :

    – 11 instituts : 2 300 religieuses.

  2. Sr Doris Lamontagne, petite franciscaine de Marie, a été pendant 12 ans responsable du Centre d’animation François-de-Laval à Québec. Elle est l’auteur d’un Prier 15 jours avec François de Laval, Nouvelle Cité, 126 p., 12,50 e.
  3. Henri Brémond, Sainte Marie de l’Incarnation, éd. du Cerf, 200 p., préfacé par le père Philippe Verdin, 19 e.