Les juges devraient dire aux athées de se désister de leur action - France Catholique
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Les juges devraient dire aux athées de se désister de leur action

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Le juge Antonin Scalia a donné une célèbre conférence à la faculté de droit de Harvard en soutenant que la primauté de la loi se ramène à la primauté des règles. Il affirmait que le système anglo-américain préfère que le texte et la tradition modèrent la prise de décisions judiciaires. Comme Ralph Rossum l’a dit, « quand le texte exprime une règle, les juges se bornent à appliquer cette règle comme faisant loi ».

Scalia parlait surtout du droit constitutionnel, mais la même interprétation est valable dans d’autres domaines. Par exemple, le droit coutumier a élaboré au fil des siècles de nombreuses règles qui régissent et disciplinent la procédure. Contourner ces règles dans l’espoir d’aboutir aux « justes » décisions légales entraîne des diktats arbitraires du pouvoir judiciaire qui sont imprévisibles et risquent de se conformer à des caprices politiques plutôt qu’à des principes établis.

La jurisprudence d’Earl Warren [1891-1974, membre et ensuite président de la Cour suprême des Etats-Unis de 1953 à 1969] qui met en application cette approche demeure l’interprétation favorite des progressistes, bien que sous des noms différents suivant les époques. Comme, par exemple, le concept d’« empathie » épousé par certains juges comme le juge de la Cour suprême Sonia Sotomayor. Mais une règle, l’ancienne doctrine de la qualité pour agir ou du fondement juridique peut aider à préserver la liberté religieuse, comme l’indique une affaire récente.

La notion de « fondement juridique » détermine ceux qui peuvent poursuivre en justice. Si vous êtes renversé par une voiture, vous pouvez poursuivre le chauffeur en dommages/intérêts pour le préjudice subi. Si vous concluez un contrat et que l’autre partie rompt ce contrat, vous pouvez demander réparation. Mais la question devient plus compliquée quand ce qui est en jeu est une sorte de « préjudice » plus subtil.

Quelle devrait être la règle type quand le préjudice subi c’est que vous êtes offensé par une mesure du gouvernement ? Les tribunaux ont également mis au point des règles concernant la qualité pour agir dans des cas de ce genre. Dans une société pluraliste, toutes sortes de citoyens peuvent se sentir lésés par diverses mesures gouvernementales, mais leur permettre à tous d’avoir qualité pour agir contre le gouvernement conduirait à une dissolution de l’ordre social. Pourtant c’est exactement ce qu’un groupe cherche à faire en ce moment.

Dans un cas de longue durée, la cour fédérale d’appel de New York – grâce au Becket Fund for religious Liberty – a demandé à un groupe d’athées d’expliquer pourquoi ils avaient qualité pour agir contre l’Autorité portuaire au sujet de l’installation de la Croix du World Trade Center, une pièce cruciforme de métal fondu trouvée sur Ground Zero, dans le Mémorial et musée national du 11 septembre où elle se trouve à présent.

Les athées déclarent qu’ils sont « insultés » et « offensés » par cette croix et soutiennent que son installation dans le musée est inconstitutionnelle. Selon eux, elle doit être soit enlevée soit entourée par une sélection aléatoire d’objets « athées », même s’ils n’ont pas été trouvés sur le site de Ground Zero. Le fait que ces plaignants n’aient pas visité en personne le musée semble sans importance. La seule présence dans ce musée d’un symbole religieux leur donne selon eux le droit constitutionnel de l’enlever.

Remarquons la mesquinerie et l’incivilité de ces revendications. Au tout début de cette affaire, les athées s’en prirent au père Brian Jordan, qui était sur place à Ground Zero après le 11 septembre pour réconforter les sauveteurs. Les athées soutiennent qu’en tant qu’acteur de l’Etat il contribuait à l’établissement d’une religion1. Cet effort a échoué, mais ils continuent à essayer de saper un symbole qui apporte un réconfort à de nombreux sauveteurs et aux familles des victimes. La croix a été trouvée sur le site, mais n’y a pas été mise par des chrétiens malveillants désireux d’exclure les autres ; cette croix, a souligné la Cour, est, tout autant que les autres, un témoin historique des attentats du 11 septembre.

La croix (au centre gauche) dans le Mémorial national du 11 septembre
Le Becket Fund a à juste titre considéré cet argument comme une extension infinie de plaintes pouvant permettre « aux partisans les plus hargneux des conceptions les plus extrêmes de la Clause de l’établissement de contester la plus petite manifestation religieuse où que ce soit sur la place publique ». A la fin du mois dernier, la cour d’appel a expressément demandé aux plaignants de « clarifier tant les dommages allégués que les théories légales invoquées pour appuyer leur qualité pour agir ».

L’argument des athées n’est ni constitutionnel, sous quelque forme que ce soit, ni un véritable argument juridique. C’est essentiellement un argument moral. Les athées – comme les virulents adversaires de la décision Hobby Lobby – veulent imposer leur utopie constitutionnelle, sans tenir compte ni de la loi du Congrès ni du « dommage » effectif. Une décision à leur encontre ne peut être simplement expliquée par la tentative de conciliation qui a précédé ce cas et exige un jugement et une certaine adhésion au texte et aux règles d’interprétation.

Le but de concepts comme le fondement juridique est précisément d’empêcher les tribunaux de devenir des arènes où il faut statuer sur la moindre offense ressentie, bien qu’on puisse pardonner aux athées d’en juger autrement, étant donné la primauté d’une jurisprudence qui estime que la ferme conviction doit renforcer les règles juridiques objectivement appliquées, s’agissant bien sûr de « justes » causes.

La Cour suprême a décrété qu’aucun citoyen n’a un droit sans restrictions de ne pas être lésé ni d’exiger que tous les discours sur la place publique se conforment à son arsenal d’opinions acceptables. Dans un cas de 1982, la Cour a soutenu que la Clause relative à l’établissement d’une religion ne donne pas à chacun « la liberté de parcourir le pays à la recherche des irrégularités commises par le gouvernement », surtout quand ces irrégularités découlent d’idées auxquelles la personne s’oppose.

Et pourtant c’est ce que veulent les athées : déterminer sous peine de veto les signes et manifestations religieux autorisés sur la place publique – faute de quoi ils subiraient un préjudice. Cette position est absurde, ce qui peut expliquer le revirement des athées à mi-parcours. A présent, ils cherchent seulement à obtenir un encadrement non religieux pour la croix du World Trade Center.

Comme le Becket Fund l’a fait valoir, cette revendication est tout aussi insoutenable. Si vous prétendez subir, du fait de la présence de la Croix du World Trade Center, un préjudice tel que vous exigez à titre de compensation qu’elle soit enlevée de la vue du public, l’installation d’autres objets ne devrait pas suffire à compenser ce soi-disant préjudice.

Ce revirement trahit leurs manigances Les plaintes en inconstitutionnalité des athées sont une couverture évidente pour dissimuler leur véritable but : éliminer par fiat judiciaire la place centrale de la religion dans l’histoire des Etats-Unis et le fait que, dans une époque de tragédie nationale, les citoyens trouvent un réconfort et un sens à leur vie dans leur religion.

Espérons que les tribunaux traiteront ces plaintes comme elles le méritent.


Gerald J Russello est un avocat et éditeur du The University Bookman.

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Source : http://www.thecatholicthing.org/columns/2014/judges-should-tell-atheists-to-stand-down.html

Photo : La Croix (centre-gauche) à la National Septembre 11 Memorial & Museum

  1. Le premier amendement de la Constitution des Etats­-Unis se lit comme suit : « Le Congrès ne fera aucune loi relative à l’établissement d’une religion ou à l’interdiction de son libre exercice. »