« Trois jours et trois nuits », tel est le titre du livre qui doit paraître cette semaine aux éditions Fayard-Julliard et qui rend compte d’une étonnante expérience. Une quinzaine d’écrivains se sont rendus, en effet, à l’abbaye de Lagrasse dans la région des Corbières, où réside une quarantaine de religieux, chanoines de Saint-Augustin. Tous ont rendu compte, selon leur sensibilité, de ce séjour qui ne les a nullement laissés indifférents. Cela ne signifie pas qu’incroyants ils aient brusquement reçu l’illumination d’un Claudel à Notre-Dame de Paris. Mais ils ont tous apprécié le climat de silence et de prière de l’abbaye, sans oublier la prévenance des religieux à leur égard.
Il y a une grâce particulière au monde monastique. Huysmans en fut l’interprète privilégié en son temps, et ce qu’il communiqua de sa conversion dans ses romans exerça une influence certaine sur ses lecteurs. Il semble que Michel Houellbecq, qui évoque Huysmans dans un de ses livres aurait aimé partager son itinéraire intérieur. Mais, pour revenir à Lagrasse, chacun réagit en fonction de sa propre histoire, de sa culture religieuse, tout en restant témoin des débats du temps. Ainsi Boualem Sansal, qui est d’origine musulmane, s’en prend curieusement à Vatican II, qu’il accuse d’avoir « répandu le wokisme et la cancel culture dans le monde occidental ». Voilà qui aurait beaucoup étonné les acteurs du concile et qui devrait alerter l’Église dans sa tête et dans ses membres. Car si l’opinion de Boualem Sansal se répandait, il y aurait un sérieux travail d’élucidation à opérer. D’où l’importance d’un asile spirituel comme Lagrasse où l’on peut recevoir le témoignage de la foi intact, reçu des origines.
Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 22 novembre 2021.