L’ouverture d’un Synode à Rome sur la famille éveille un réel intérêt. Bien sûr, puisque le sujet est brûlant, puisqu’il était dans la rue dimanche. Beaucoup mettent un grand espoir dans cet événement. Je ne voudrais pas doucher leur enthousiasme, mais l’expérience journalistique que j’ai des synodes m’incite à quelque prudence. Je sais bien que le pape François a plaidé vigoureusement en faveur d’une discussion franche et ouverte, où chacun pourrait dire ce qu’il avait envie de dire, sans fausse pudeur et sans crainte du qu’en-dira-t-on. Il a aussi plaidé en faveur de la simplicité. Il ne s’agit pas, a-t-il dit, de vouloir jouer au plus intelligent. Attendons de voir comment l’assemblée fonctionnera, pour savoir si certains obstacles anciens ont pu être levés.
Il faut avoir bien en tête que les évêques réunis représentent toute la planète. Et qu’ils sont porteurs de situations singulières qui ne se recoupent pas forcément. Il n’est pas évident de former un discours unifié, surtout en matière pastorale, lorsqu’on reflète telle Église particulière, d’Europe, d’Afrique, d’Amérique ou d’Asie. Il est possible que des désaccords apparaissent dans la discussion. Le pape sollicite d’ailleurs l’expression des opinions contrastées. Mais il faut aussi se mettre en tête qu’un Synode épiscopal n’est pas n’importe quelle assemblée parlementaire dont la décision finale est arbitrée par la majorité. En Église, c’est la règle de l’unanimité morale qui prévaut, ce qui ne signifie pas un arasement arbitraire des contradictions et des contrariétés. Mais le désir de se retrouver peut-être dans ce que Jean Guitton appelait « une vérité plus haute ». En tout cas, il s’agit en définitive de se retrouver dans l’unité de la foi.
Que l’on ne croie pas forcément à des conditions idylliques. Le grand théologien Louis Bouyer, dans ses Mémoires, n’est pas tendre sur certaines illusions. S’il faut parler d’unanimité dans l’amour, ce ne peut être qu’au terme de grandes épreuves et de désillusions. Il faut avoir en mémoire toute l’histoire pour se faire une juste idée de la synodalité. Mais voilà qui doit nous inciter à prier en union avec nos évêques à Rome.