Les deux martyres de saint Jean - France Catholique
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Le martyre des carmélites
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Les deux martyres de saint Jean

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Saint Jean de Brébeuf au sanctuaire des Martyrs, Ontario.

Saint Jean de Brébeuf au sanctuaire des Martyrs, Ontario.

© Jfvoll / CC by-sa

Une réplique exacte du Suaire de Turin est exposée au « Catholic Information Center » (CIC) à Washington, D.C., avec l’aimable autorisation du Museum of the Bible. Le père Charles Trullols, du CIC, a commenté cette exposition : « Le Suaire nous rappelle que nous devons garder le message du Mercredi des cendres gravé dans nos âmes, en contemplant l’empreinte de la souffrance de Notre Seigneur sur le Suaire. Nous devons également aider Jésus avec sa croix, avec ses souffrances. »

En contemplant ces mots, je n’ai pas pu m’empêcher de penser au martyre de saint Jean de Brébeuf. J’ai consulté, le lendemain, le rapport original dans les Relations des Jésuites, basé sur le témoignage de deux Indiens Hurons, qui avaient été témoins de l’événement et s’étaient échappés.

Pour commencer, ils lui ont arraché les ongles. Puis ils l’ont battu férocement avec des gourdins, environ 200 coups, sur les reins, le ventre, les jambes et le visage : « Bien qu’accablé sous le poids de ces coups, le Père de Brébeuf ne cessait de parler de Dieu, et d’encourager tous les nouveaux chrétiens captifs comme lui à bien souffrir pour bien mourir, afin d’aller en compagnie de lui au Paradis. »

Ensuite, un Iroquois lui répond par un simulacre de baptême en versant trois fois de l’eau bouillante sur lui : « Echon », c’est le nom du Père de Brébeuf en Huron, tu dis que le baptême et les souffrances de cette vie mènent tout droit au Paradis; tu iras bientôt, car je vais te baptiser, et te faire bien souffrir, afin d’aller plus tôt à ton Paradis ».

Ensuite, ils lui ont mis un collier de six hachettes chauffées à blanc. « Je n’ai pas vu de supplice qui m’ait plus ému de compassion que celui-là. Car tu vois un homme, attaché nu à un poteau, qui, ayant ce collier au cou, ne peut savoir quelle posture adopter. Car, s’il se penche en avant, ceux qui sont au-dessus de ses épaules lui pèsent davantage ; s’il se penche en arrière, ceux qui sont sur son ventre lui font subir le même supplice ; s’il se tient droit, sans se pencher ni d’un côté ni de l’autre, les hachettes brûlantes, appliquées également des deux côtés, lui font subir un double supplice. »

Ensuite, on lui enroule autour de la taille une ceinture bourrée de poix et de résine très inflammables, et on y met le feu, « ce qui lui rôtit tout le corps ». Pendant tout ce temps, « le Père de Brébeuf endura comme un roc, insensible au feu et aux flammes, ce qui étonna tous les misérables sanguinaires qui le tourmentaient. Son zèle était si grand qu’il prêchait continuellement à ces infidèles, pour essayer de les convertir ».

Puis, pour l’empêcher de parler, ils lui coupèrent la lèvre supérieure et la lèvre inférieure. Puis ils lui écorchèrent les jambes jusqu’à l’os et firent rôtir la chair sous ses yeux. Les moqueries se poursuivent. « Tu vois bien que nous te traitons en ami, puisque nous serons la cause de ton bonheur éternel ; remercie-nous donc des bons offices que nous te rendons, car plus tu souffriras, plus ton Dieu te récompensera. »

Alors qu’il était encore en vie mais sur le point de mourir, ils lui ont arraché le cœur et l’ont mangé, tout en buvant son sang encore chaud. Ils ont été tellement impressionnés par son courage qu’ils ont voulu lui ressembler.

Je savais que la fête des martyrs nord-américains était le 19 octobre. Mais quand Jean de Brébeuf est-il mort ? J’ai cherché. C’était le 16 mars 1649, pendant le carême. (Le dimanche de Pâques était le 4 avril cette année-là). Il a été capturé tôt le matin et est mort à 16 heures, après seize heures de ce qu’un auteur séculier a appelé « l’un des martyres les plus atroces des annales de la chrétienté ».

Il est à noter qu’un témoignage aussi extraordinaire ne vient pas de nulle part. Le père de Brébeuf était arrivé en Nouvelle-France vingt-quatre ans plus tôt. Il a étudié avec beaucoup d’attention les Algonquins d’abord, puis les Hurons. Il fut le premier Européen à maîtriser le wendat, la langue huronne, composant un dictionnaire, une grammaire et des catéchismes.

Il écrivit le célèbre « Huron Carol » en wendat, bien que les mots qu’il employait fussent différents. Il ne commence pas par le nostalgique « Twas in the moon of wintertime », mais par un sévère avertissement de ne pas écouter le diable :

Courage, vous qui êtes des humains. Jésus est né.
Voici qu’il s’est enfui, l’esprit qui nous tenait prisonniers.
Ne l’écoutez pas, car il corrompt nos esprits, l’esprit de nos pensées.

(L’air utilisé par le saint était également différent. Vous pouvez l’écouter : « Une Jeune Pucelle », une chanson populaire française de 1557).

Le Journal spirituel de Jean de Brébeuf révèle un homme profondément dévoué à la prière contemplative et strict dans l’observation de sa règle, qui a reçu de nombreuses visions mystiques, dont certaines étaient en même temps accompagnées de tentations du diable. En 1631, il prononça un « vœu de service », qui contient les mots suivants : « Je vous fais le vœu de ne jamais manquer, de mon côté, à la grâce du martyre, si par votre infinie miséricorde vous me l’offrez un jour, à moi, votre indigne serviteur ».

Mais ce qui est peut-être tout aussi impressionnant, c’est son martyre sans effusion de sang, son retour à l’apostolat, encore et encore, pendant trois décennies, malgré les rejets répétés, les persécutions, et seulement une poignée de conversions. Juste avant sa mort, il a écrit : « Ô mon Dieu, pourquoi n’êtes-vous pas connu ? Pourquoi ce pays barbare n’est-il pas tout entier converti à toi ? Pourquoi le péché n’y est-il pas aboli ? Pourquoi n’êtes-vous pas aimé ? Oui, mon Dieu, si tous les tourments que les captifs peuvent endurer dans ces pays, dans la cruauté des tortures, tombaient sur moi, je m’y offre de tout mon cœur, et je les souffrirai seul. »

Saint Jean de Brébeuf, priez pour nous.