Un ami diplomate, qui connaît particulièrement bien l’Afrique, me disait récemment : « Toi qui as connu l’Afrique de l’Ouest au lendemain des indépendances, tu ne la reconnaitrais plus du tout aujourd’hui. » C’est vrai qu’après un séjour de plus d’un an dans l’actuel Burkina Faso, je ne suis plus jamais retourné sur le continent africain, en dépit des amitiés que j’avais laissées là-bas. Aussi est-ce avec le plus vif intérêt que je me suis informé de la visite du président Macron à Ouagadougou, la capitale burkinabée. La ville que j’avais connu, lors de mon temps de coopération, comptait une cinquantaine de milliers d’habitants ; elle en compte aujourd’hui plus d’un million. À mon époque, il n’y avait pas encore d’université. Elle a été créée depuis et n’a cessé de grandir, entourée de nombreux établissements supérieurs. Nous avons pu apprécier les images d’une belle foule étudiante, écoutant mardi avec passion le discours d’Emmanuel Macron.
Mon ami diplomate me disait aussi : « Il ne faut pas avoir une vision trop pessimiste du continent africain, il se développe et il a de nombreuses ressources. » C’était d’ailleurs l’image qu’il nous donnait avec cette jeunesse ardente, réactive. Dans les années soixante, le fameux agronome René Dumont publiait un livre réquisitoire : L’Afrique est mal partie. Ce n’est plus le cas aujourd’hui, en dépit des défis formidables que le président a évoqués : défi terroriste avec le fondamentalisme islamiste qui a frappé par deux fois Ouagadougou, défi climatique qui ravage le Sahel plus que toute autre région du monde, défi démographique avec 450 millions de jeunes à insérer sur le marché du travail, défi de l’urbanisation – à Ouaga, c’était inutile d’en faire la démonstration.
La France sera-t-elle au rendez-vous d’une nouvelle coopération indispensable pour relever ces défis ? On le souhaite de tout cœur. C’était déjà mon vœu le plus ardent, lorsque j’imaginais l’avenir des soixante jeunes écoliers que j’avais dans ma classe de CE2. Vœu qui a été déçu. Mais ce n’est pas une raison pour ne pas reprendre tout à neuf. J’ai apprécié, pour ma part, qu’Emmanuel Macron refuse de se laisser enfermer dans des débats paralysants. La question n’est pas de débattre sans fin des méfaits de la colonisation, mais de déterminer les moyens de coopération qui propulseront l’Afrique vers son développement, en exorcisant la tentation d’une migration massive de ses élites les plus performantes.
Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 30 novembre 2017.
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