Nous n’avons que peu de choses à ajouter aux analyses qui sont faites sur les résultats du premier tour de l’élection présidentielle. La France se trouve divisée à peu près en cinq familles politiques dont on connaît les porte-parole : Nicolas Sarkozy, François Hollande, François Bayrou, Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon. La simplification apportée par le second tour débouchera sur l’élection d’un seul d’entre eux, sans pour autant abolir les différences significatives de notre sociologie politique, qui d’ailleurs vont poser des problèmes lors des législatives qui suivront.
Un sondage publié par notre confrère La Vie montre que les catholiques pratiquants ont largement privilégié le président sortant, tout en votant moins que la moyenne des Français en faveur de Marine le Pen. S’ils n’ont été que 14% à voter pour François Hollande, il est hautement probable que c’est en raison des choix sociétaux du candidat socialiste qui vont à l’encontre de leurs convictions morales. Il n’empêche que les chrétiens sont présents dans toutes les familles idéologiques, y compris au Front de Gauche. C’est qu’ils sont aux prises avec des exigences complexes qu’il leur faut manifester dans le cadre de programmes qui ne les satisfont qu’imparfaitement.
L’Église laisse à ses fidèles la responsabilité de leurs engagements, en les encourageant à s’investir complètement dans les tâches civiques. C’est qu’il y a une distance infranchissable entre la foi et la civilisation contingente d’une période de l’histoire. Si cette distance s’abolissait, c’est que l’on aurait succombé à ce que Kierkegaard appelait « l’effroyable illusion », c’est-à-dire celle qui prétend abolir la transcendance de l’événement divin que signifie l’Église avec des choix politiques. La cité ici-bas, rappelait le cardinal Daniélou dans un livre essentiel 1, n’est pas la Jérusalem céleste. Elle est toujours en tension avec elle, ce qui détermine le respect de principes non négociables qui relèvent de la loi divine. Au total, la conscience chrétienne qui se débat dans l’arène électorale doit se déterminer pour le meilleur possible, en dépit de toutes les imperfections inhérentes à notre situation dans un monde provisoire.