Le syndrome cléricaliste - France Catholique
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Funérailles catholiques : un temps de conversion
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Le syndrome cléricaliste

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« Comment, avec un tel dossier, quelqu’un a-t-il pu devenir cardinal ? »

Cette question revient sans cesse depuis qu’on a révélé que le cardinal Theodore MCCarrick, 87 ans, archevêque de Washington, a été sur l’ordre du Pape suspendu de son ministère après avoir été accusé – accusation estimée par l’archidiocèse de New York « crédible et fondée » – d’avoir abusé d’un mineur il y a 47 ans.

Le cardinal McCarrick dit qu’il n’en a pas souvenir et fait appel de sa suspension par un procès canonique. L’archidiocèse de New York, où le cardinal a servi comme prêtre, a dit que l’accusation ne date que de quelques mois.

Mais, entretemps, l’archidiocèse de Newark et le diocèse de Metuchen, New Jersey, où il a servi comme ordinaire de 1981 à 2001, dit que sur trois accusations d’inconduite sexuelle, impliquant des adultes, deux ont été réglées en accord avec les plaignants. Il a été muté à Washington et nommé cardinal en 2001.

Alors, que s’est-il passé ?

Tandis que le calme revient après le scandale qui a suivi les révélations, il est important de trouver des réponses à cette question dans le but de prévenir des problèmes similaires à l’avenir. Et bien que je n’aie aucune information à la source quant à la carrière du cardinal, je trouve bien facile de comprendre la dynamique de son ascension dans la hiérarchie, malgré un dossier inquiétant.

Pour faire bref, ces choses qui arrivent dans l’Eglise sont un effet du cléricalisme qui va de pair avec la pratique du secret. J’ai décrit le processus en termes généraux dans mon livre Nothing To Hide: Secrecy, Communication, and Communion in the Catholic Church [ « Rien à cacher : Secret, communication et communion dans l’Eglise catholique »]

L’amitié, la solidarité et le soutien mutuel entre prêtres sont de très bonnes choses. Mais les problèmes surgissent quand la culture cléricale est infectée par l’esprit du cléricalisme – l’idée que ses membres sont une élite dans l’Eglise jouissant de privilèges et d’immunités spéciaux. La situation devient même plus grave quand le secret est combiné avec l’élitisme, comme cela arrive si souvent.

Comme je le dis dans mon livre : d’un certain point de vue, le cléricalisme est pour le clergé la manière de céder à deux tentations qui menacent de corrompre toute profession, tout métier. D’une part la tendance à détourner et à pervertir la solidarité et la loyauté mutuelle qui lient à juste titre ses membres (docteurs soutenant des collègues incompétents, avocats honnêtes fermant les yeux sur les défaillances éthiques d’avocats malhonnêtes), d’autre part la tendance à tolérer un manque de responsabilité face aux exigences professionnelles. La pratique du secret favorise les deux tendances.

Le secret (ou la confidentialité) est évidemment nécessaire dans l’Eglise quand il s’agit de certains sujets. Mais on en abuse facilement et ces abus sont maintenant présents dans l’Eglise pour les finances, les traitements des évêques et des prêtres, la gestion et bien d’autres choses. Ces dernières années le problème s’est douloureusement manifesté dans le cas des abus sexuels du clergé.

« Ce n’est pas le cléricalisme qui cause les abus sexuels et ce ne sont pas les abus sexuels qui ont causé le cléricalisme » (je cite encore mon propre livre) « Mais le lien entre eux est très réel. » L’abus sexuel dans un cadre cléricaliste prend naturellement cette coloration, ce qui rend difficile de garder les deux choses séparées et distinctes.

Pour dire les choses simplement, les attitudes et les styles de comportement liés à l’élitisme clérical ne cessent de réapparaître lorsque des prêtres sont découverts par leurs supérieurs comme impliqués dans une agression sexuelle… Il n’y a pas d’autre moyen d’expliquer de façon crédible les actes d’évêques connus pour être des hommes honnêtes, intelligents, consciencieux et qui néanmoins ont étouffé les crimes honteux de prêtres indociles et ont muté quelques-uns d’entre eux dans d’autres paroisses sans même se préoccuper de mettre au courant les paroissiens. Comme nous le savons maintenant, bien sûr, certains évêques étaient eux-mêmes des hommes indociles.

Certes, les évêques dans le passé ont reçu régulièrement, pour traiter les cas d’agressions sexuelles, des avis incroyablement mauvais venant de fonctionnaires du ministère de la Justice, d’avocats, de psychiatres et de psychologues et d’autres à qui ils faisaient confiance. Mais cela étant dit, la maladresse avec laquelle de bons évêques ont traité le cas de prêtres défaillants fait apparaître sans conteste les choix cléricalistes qui prévalaient alors.

C’est donc le style cléricaliste des attitudes et des comportements qui permet largement d’expliquer l’ascension dans la hiérarchie du cardinal McCarrick .

C’était une individualité brillante, présentant bien, talentueuse, qui s’est mal conduit (nous sommes maintenant au courant de cas spécifiques mais la rumeur, pendant des années, en a évoqué beaucoup plus). Pourtant, il était au service de l’Eglise et jusqu’à un certain degré semblait au moins avoir fait des efforts et renoncé à son mauvais comportement. Mieux vaut oublier le passé et regarder vers l’avenir.

C’est le raisonnement qui doit avoir circulé parmi les autorités de l’Eglise – aux Etats-Unis et aussi à Rome – qui avaient un mot à dire dans ses promotions. Ce n’est que plus tard qu’il est apparu que c’était une terrible erreur.

Les révélations sur le cardinal McCarrick sont un désastre pour l’Eglise et une humiliation pour lui. A certains égards, les grands responsables de son ascension dans la hiérarchie avaient raison de voir en lui un homme de talent qui, de différentes manières, a servi l’Eglise. Mais il faisait aussi des choses qui auraient dû le disqualifier pour un haut ministère ecclésial. Sur les deux chefs, le bon et le mauvais, nous devons prier pour lui – et pour toute l’Eglise – maintenant.

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https://www.thecatholicthing.org/2018/06/27/the-clericalist-syndrome/

https://fr.wikipedia.org/wiki/Theodore_Edgar_McCarrick

https://www.la-croix.com/Religion/Catholicisme/Monde/Le-pape-suspend-cardinal-americain-Theodore-McCarrick-accuse-dabus-sexuel-2018-06-20-1200948815

https://www.lemonde.fr/international/article/2018/06/21/soupconne-d-abus-sexuels-le-cardinal-americain-theodore-mccarrick-suspendu_5318586_3210.html

https://www.challenges.fr/societe/abus-sexuels-le-cardinal-americain-theodore-mccarrick-suspendu_595788

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Russell Shaw est ancien secrétaire pour les Affaires publiques de la Conférence nationale des évêques catholiques/USA. Il est l’auteur de Nothing to Hide [Rien à cacher]et aussi de To Hunt, To Shoot, To Entertain: Clericalism and the Catholic Laity [Chasser, tirer, divertir : le cléricalisme et les laïcs catholiques] et son plus récent livre est American Church: The Remarkable Rise, Meteoric Fall, and Uncertain Future of Catholicism in America (2013).[L’Eglise américaine : ascension remarquable , chute météorique et avenir incertain du catholicisme en Amérique (2013)]