Il me vient un scrupule grave en commençant cet éditorial, où je dois parler du suicide d’un soldat, qui a voulu sacrifier sa vie pour un peuple délaissé de l’autre côté du monde. En aucun cas, je ne puis faire l’éloge du suicide qui est un véritable fléau social. Une enquête récente montre que la France est particulièrement touchée par ce fléau, qui concerne le plus souvent des êtres fragiles. Notamment des jeunes, des adolescents. Ce qui importe, c’est de développer une culture de vie à l’encontre de toutes les tentations mortifères. Nous ne sommes pas dans un climat favorable au goût de vivre, alors qu’on voudrait changer la législation qui interdit « le suicide assisté ». Ce contre quoi il faut se battre avec la dernière énergie, comme le font en ce moment les militants de l’alliance VITA.
Néanmoins, je parlerai quand même de ce colonel français, Robert Jambon, qui à l’âge de 86 ans, a mis fin à ses jours au pied du monument aux morts d’Indochine à Dinan en Bretagne. Il ne s’agissait pas pour lui de ce qu’on appelle un geste désespéré, mais d’un appel au secours en faveur d’une population oubliée, le peuple hmong, au côté duquel il avait combattu ans les années 50. Cette minorité ethnique du Laos avait été engagée, en effet, avec les Français, refusant de subir le joug communiste. Les Hmongs ont été oubliés aussi bien par les Français que par les Américains, au terme des deux guerres d’Indochine, qui furent deux défaites pour les uns et pour les autres. J’étais un enfant dans les années 50, mais je me souviens, comme si c’était hier, de la tragédie des chrétiens que nous avions abandonnés à la suite des accords de Genève en 1954.
Le peuple hmong est pourchassé par le pouvoir communiste laotien, et il est en grand danger. Qui s’en soucie chez nous ? Il faut malheureusement ce geste d’un colonel, auquel l’abandon est insupportable, pour que nous nous souvenions de cette population chrétienne persécutée. Colonel, je n’accepte pas votre geste, qui est d’un stoïcien mais pas d’un chrétien. Mais je salue la cause pour laquelle vous vous êtes sacrifié, en espérant que nos diplomates se mobiliseront en faveur de ce petit peuple héroïque !
Chronique lue sur radio Notre-Dame le mercredi 14 décembre 2011.
— – Lire en pièce jointe l’article du « Petit Bleu » (Dinan)
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