Est-il exact que l’immigration ne fait pas partie des principales priorités des Français ? Beaucoup de commentateurs politiques l’affirment en se fondant sur des sondages. Et il est vrai qu’il existe beaucoup d’autres sujets de préoccupations chez nos concitoyens, ne serrait-ce que le chômage persistant à un haut niveau et le pouvoir d’achat qui a été à l’origine de la révolte des Gilets jaunes. Mais j’ai du mal à croire que les Français ne soient pas profondément préoccupés par tous les problèmes liés à l’immigration et dont on parle, d’abondance, tous les jours.
Un phénomène qui concerne toute l’Europe
N’est-ce pas l’Europe entière qui est en pleine mutation politique parce que les opinions publiques manifestent désormais plus que de l’inquiétude à propos d’un phénomène qui bouleverse les rapports sociaux ? Pour s’en convaincre, il suffit d’observer ce qui s’est passé en Italie avec la montée en puissance d’un Salvini qui a complètement changé les équilibres politiques de la péninsule.
Une réalité indéniable mais difficile à chiffrer
Il en va de même pour la France, avec un Rassemblement national qui a brisé le fameux plafond de verre dont on parlait hier. On ne peut sous-estimer des réalités qui sont massives. Pour donner un seul exemple significatif, même s’il est le fait d’un département à la démographie singulière : selon un rapport parlementaire rédigé l’an dernier par François Cornut Gentille et Rodrigue Kokouendo, l’État est incapable de connaître la réalité de la situation de la Seine-Saint-Denis. Les autorités responsables ne peuvent chiffrer le nombre d’étrangers en situation irrégulière. Sont-ils 150 000, ou 400 000 ? Personne n’est capable de faire une évaluation plausible. La même incertitude concerne le rôle joué par l’Éducation nationale. Dans quelle mesure l’école est-elle capable de former des jeunes, de leur faire acquérir le degré de compétence nécessaire dans un tel département ?
Affronter le problème
François Cornut Gentille parle à propos du 9-3 d’un miroir grossissant de la France d’aujourd’hui. Non, traiter de l’immigration ce n’est pas, comme le veut tel éditorialiste afficher un chiffon rouge, c’est envisager le présent et l’avenir d’un pays, voire d’un continent. Le gouvernement s’en préoccupe. Il a annoncé hier un certain nombre de mesures pour faire front. Sont-elles efficaces ? Suffiront-elles à convaincre une opinion inquiète, qui sait que déjà le pays a été profondément remodelé dans sa géographie humaine ? Est-il possible d’obtenir un consensus raisonnable pour trouver des solutions à une question aux dimensions mondiales ?
Chronique diffusée sur radio Notre-Dame le 7 novembre 2019.