Le sens plénier des Ecritures - France Catholique
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Le martyre des carmélites
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Le sens plénier des Ecritures

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Considérez un moment l’extrait des Ecritures qui suit. Il contient la fameuse promesse de Dieu à David d’établir une alliance éternelle avec l’un de ses descendants :

Le Seigneur parla à Nathan et dit :

« Va dire à mon serviteur David….

Quand ton temps sera venu de reposer avec tes pères,

J’élèverai ton héritier après toi, le rejeton de tes reins,

et j’établirai fermement sa royauté ;

C’est lui qui bâtira une Maison pour mon Nom.

Et j’affermirai son trône pour toujours.

Je serai un père pour lui,

et il sera pour moi un fils. » (2 Samuel 7:4-5, 12-14)

Le célèbre fils de David était Salomon, et Salomon a en effet bâti le premier temple de Jérusalem après le décès de son père. Ce passage semble donc littéralement faire référence à Salomon. Mais est-ce le cas ?

Remarquez les promesses. Outre « c’est lui qui bâtira une Maison pour mon Nom », nous trouvons également ces trois promesses :

(1) J’établirai fermement sa royauté.

(2) J’affermirai son trône.

(3) Je serai un père pour lui et il sera pour moi un fils.

Le problème, quand on applique ces promesses à Salomon, est que, si son royaume est resté solide durant sa vie, il s’est divisé en deux après sa mort, semblant rendre vaine la promesse « d’affermir son trône [celui de David ou de Salomon] pour toujours ». De même, après cette division, Israël, le royaume du nord, allait finalement tomber aux mains des Assyriens en 722 av. JC ; Juda, le royaume du sud, allait tomber de la même manière aux mains des Babyloniens en 598 av. JC. Partant, ni le royaume ni le trône ne semblent « avoir été affermis » pour toujours – en tout cas pas pour plus longtemps que la durée du règne de Salomon.

Quant à la promesse selon laquelle « Je serai un père pour lui et il sera pour moi un fils », Salomon était renommé dans les Ecritures pour sa sagesse mais également pour ses péchés – l’un des plus flagrants étant son idolâtrie : les Ecritures nous disent qu’il a pris des centaines d’épouses étrangères, et davantage encore de concubines, et a construit à Jérusalem des centaines de lieux de culte pour leurs dieux. Pas exactement le comportement d’un fils loyal manifestant son obéissance à son Père céleste.

Ce que de grands exégètes comme Saint Jérôme et Saint Thomas d’Aquin nous diraient, c’est qu’il y a des choses dans ce texte de 2 Samuel 7 qui semblent clairement « dépasser le cadre de l’événement » – l’événement étant la royauté de Salomon et ses suites. Ces promesses n’ont été vraiment accomplies, nous diraient-ils, qu’avec la venue du Christ, quand, par l’Incarnation, la mort, la Résurrection et l’Ascension à la droite du Père, Il a (a) établi le Royaume de Dieu ; (b) « affermi son trône royal pour toujours » dans les Cieux ; et ( c) comme Fils de Dieu, parfaitement réalisé la promesse selon laquelle Dieu serait « un père pour lui et il sera pour moi un fils ».

Le prophète qui a écrit 2 Samuel 7 avait peut-être Salomon à l’esprit, ou peut-être qu’il n’avait pas idée de la personne qu’il évoquait. Nous ne savons pas. Mais les exégètes comme Saint Jérôme et Saint Thomas croyaient que l’auteur prophétique, quel qu’il soit, œuvrait comme l’instrument de l’Esprit-Saint qui connaissait la vérité toute entière à laquelle ces mots faisaient référence.

Salomon a effectivement bâti un temple, il a effectivement régné comme souverain. Mais ce n’était qu’un avant-goût imparfait de Celui en qui la promesse se réalise entièrement. Alors, au lieu de prétendre, comme l’exégète du Ve siècle Théodore d’Antioche, que le texte s’appliquait littéralement à Salomon et seulement de façon allégorique au Christ – une position qui a été condamnée par le Second Concile de Constantinople en 553 – Thomas d’Aquin, suivant Jérôme, dira que le texte fait référence au Christ, tout à fait littéralement : ses promesses ne sont accomplies qu’en Lui.

Ce n’est pas que le texte ne fasse aucunement référence à Salomon, mais il le fait seulement de façon inachevée et imparfaite, comme préfiguration du Christ. « Ces mots doivent être expliqués » dit Saint Thomas « comme parlant du royaume de Salomon dans la mesure où il est un symbole du Royaume du Christ dans lequel toutes les choses dites trouveront leur accomplissement. »

Il vaut la peine de s’en souvenir si quelqu’un vous dit que le passage en Isaïe 7:14 prophétisant que « une vierge concevra et mettra au monde un fils » ne fait pas référence à la naissance du Christ, ou que les passages traitant du « serviteur souffrant » ne parlent pas réellement de Jésus.

Il était méprisé et laissé de côté par les hommes,

homme de douleurs, familier de la souffrance,

tel celui devant qui on cache son visage ;

méprisé, et nous ne lui portions nulle estime.

Pourtant, ce sont nos souffrances qu’il portait,

nos douleurs qu’il endurait.

Nous, nous l’estimions touché, frappé par Dieu et humilié.

Mais il était transpercé en raison de nos péchés,

broyé en raison de notre iniquité.

Il supporte le châtiment qui nous restaure,

nous recevons la guérison par ses blessures.

Quel est le « sens littéral » de ce texte ? Ce n’est pas toujours aussi évident que les gens semblent le penser. C’est pourquoi nous avons besoin de saints comme Jérôme et Thomas d’Aquin pour nous guider. Ces mots parlent-ils vraiment de Jésus et de ce qu’Il a fait pour nous ? Son cheminement vers la Croix est-il vraiment l’accomplissement de cette prophétie ? Dieu savait-Il, des siècles avant l’événement, ce qu’Il ferait dans et par le Christ ?

Vous feriez mieux de le croire. C’était un amour si grand qu’Il connaissait le moment de la chute d’Adam. La fin heureuse de l’histoire ne faisait aucun doute. C’est seulement notre rôle dans l’histoire qui doit toujours se négocier. Tout ce que nous avons à faire, c’est suivre l’exemple de Marie et dire « oui ».

— –

Randall B. Smith est professeur de théologie (chaire Scanlan) à l’université Saint Thomas de Houston (Texas).

Illustration : « l’entrée du Christ à Jérusalem » par Pietro Lorenzetti, vers 1310 [basilique inférieure Saint François d’Assise à Assise]

Source : https://www.thecatholicthing.org/2017/04/12/the-fuller-sense-of-scripture/