Le sceau de la Sainte Famille - France Catholique
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Le sceau de la Sainte Famille

Pour les Coptes de ce pays, la venue en Égypte de la Sainte Famille est une fierté. Sur place, se plonger dans cette histoire demande un saut dans la foi copte, pour qui la terre d’Égypte tout entière fut bénie par le passage de Joseph, Marie et l’Enfant Jésus. Reportage.
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La fuite en Égypte est représentée dans de nombreuses églises, comme ici dans la monumentale cathédrale copte orthodoxe de la Nativité du Caire. En-dessous figurent les mots du prophète Osée, « D’Égypte, j’ai appelé mon fils ».

La fuite en Égypte est représentée dans de nombreuses églises, comme ici dans la monumentale cathédrale copte orthodoxe de la Nativité du Caire. En-dessous figurent les mots du prophète Osée, « D’Égypte, j’ai appelé mon fils ».

© C. V.

Les mots du prophète Osée constellent de nombreuses églises égyptiennes : « D’Égypte, j’ai appelé mon fils » (Os 11, 1). Repris dans l’Évangile selon saint Matthieu (2, 15), ils sont une fierté pour les Coptes du pays, un sceau qui marque pour toujours le caractère chrétien de la terre d’Égypte. Le contexte de l’arrivée de saint Joseph, de la Vierge Marie et de l’Enfant Jésus est raconté chez Matthieu : après la naissance du Christ, un ange apparaît en songe à saint Jospeh et lui dit : « Lève-toi ; prends l’enfant et sa mère, et fuis en Égypte. Reste là-bas jusqu’à ce que je t’avertisse, car Hérode va rechercher l’enfant pour le faire périr » (Mt 2, 13). La Sainte Famille ne reviendra qu’à la mort du tyran, lorsque l’ange apparaîtra de nouveau en songe à saint Joseph, déclarant : « Lève-toi ; prends l’enfant et sa mère, et pars pour le pays d’Israël, car ils sont morts, ceux qui en voulaient à la vie de l’enfant » (Mt 2, 20). Entre ces deux moments, l’Évangile évoque seulement le massacre des Saints Innocents, commandité par un Hérode fou de rage. Mais de la vie en Égypte de la Sainte Famille, rien n’est dit. Pourtant, suivre la tradition copte tout en foulant la terre égyptienne, permet d’entr’apercevoir ce qu’elle a pu être.

Vision de Théophile d’Alexandrie

La tradition copte repose principalement sur la vision du patriarche Théophile d’Alexandrie, prédécesseur de saint Cyrille, entre la fin du IVe et le début du Ve siècle. Théophile affirme qu’après avoir prié, la Vierge lui apparaît et lui narre la fuite en Égypte. Selon elle, c’est naturellement par la région du Sinaï que la Sainte Famille entre en Égypte, longeant la côte méditerranéenne, vers le delta du Nil, s’arrêtant au Caire, où se trouvent parmi les lieux les plus remarquables.

Première impression déroutante

À l’inverse de certains lieux sacrés en Terre sainte, l’environnement a énormément changé et la première impression peut être pour le moins déroutante. Le Caire est une ville tentaculaire et le pèlerin qui voudra se rendre sur les lieux de passage de la Sainte Famille devra d’abord braver la circulation qui sature la ville. Arrivé en face de la pointe sud de l’île de Roda, il lui suffira de parcourir 300 mètres où, baignés par l’atmosphère ocre d’une capitale égyptienne balayée par la poussière du désert environnant, des clochers se détacheront, indiquant la présence du quartier copte. Dans ce quartier, l’église Saints-Serge-et-Bacchus, où se trouve la grotte où la Sainte Famille se serait reposée. Un puits est même conservé, celui où elle aurait puisé de l’eau.

Dans l’église Saints-Serge-et-Bacchus du Caire, se trouve la grotte où se serait arrêtée la Sainte Famille lors de la fuite en Égypte.
Dans l’église Saints-Serge-et-Bacchus du Caire, se trouve la grotte où se serait arrêtée la Sainte Famille lors de la fuite en Égypte.

Foi démonstrative et populaire

« Nous sommes bénis ! » s’exclame Adel, copte catholique cairote de 50 ans, lorsqu’on lui demande le lien de son pays avec la Sainte Famille. La marque qu’elle laisse chez les Égyptiens est d’un rapport très sensible, à l’image de la foi démonstrative et populaire, que l’on voit dans les églises coptes du pays, où des familles entières viennent faire le tour des reliques de saints, exposées derrière des vitres, les touchant et les embrassant. « Dites-vous que les premiers pas que fit le Christ enfant, furent sur la terre d’Égypte », lance Adel dans un regard brillant, avant de surenchérir : « Nous sommes très fiers. La première eau qu’il a bue, c’est même sans doute celle du Nil. » Lorsqu’on interroge les chrétiens du pays, tous s’accordent à dire que le passage de la Sainte Famille, en plus d’être lié à des endroits précis rapportés par la tradition copte, bénit le territoire tout entier. Car pour eux, il n’y a pas de « fuite » en Égypte, mais une « entrée ».

« Tous ces lieux ont été sanctifiés par le Seigneur », abonde Mgr Nicolas Thévenin, nonce apostolique en Égypte. « Les nombreuses communautés chrétiennes présentes dans le pays sont un signe que le Christ est venu », continue le diplomate. Les sites où serait passée la Sainte Famille fourmillent en Égypte, jusqu’à 200 kilomètres au sud du Caire, à Assiout. C’est là que fut construit le monastère de Deir el-Muharraq où l’ange Gabriel serait apparu en songe à Joseph, pour lui annoncer la mort d’Hérode et lui demander de revenir en pays d’Israël.

L’église de la Vierge-Marie

Retour au Caire, dans le quartier Maadi, en un lieu beaucoup plus calme que le reste de la capitale. Là, se dresse sur le Nil l’église de la Vierge-Marie, véritable lieu de vie où couples et familles viennent s’asseoir à l’extérieur et profiter de la vue sur le fleuve.

Curieusement, l’endroit n’est pas mis en valeur et il faudra demander à une paroissienne la clé pour venir à bout du cadenas, bloquant une grille qui donne sur un petit escalier, qui descendait jadis au Nil. Quelques marches d’une importance capitale : ce sont celles qu’aurait empruntées la Sainte Famille pour embarquer sur le Nil et se diriger vers le sud. Ce lieu, à l’image des autres étapes du circuit qu’auraient effectué saint Joseph, la Vierge et l’Enfant Jésus, dessine le portrait d’une Sainte Famille qui fut, pour la tradition, toujours en mouvement. Le pèlerin qui ira d’un lieu à l’autre pourra commencer à ressentir le pas pressent de saint Joseph, guidant et protégeant « l’enfant et sa mère », ainsi que l’attachement de Marie à son fils, qu’elle tient dans ses bras à longueur de représentation.

Il restera cependant toujours cette question : la Sainte Famille a-t-elle véritablement visité tous ces endroits ? En dehors de la tradition copte, peu a été dit sur le sujet. Ce sera à chacun d’en décider, face aux lieux. Ce qu’il y a de sûr, en revanche, c’est le cortège d’églises et de monastères laissés tout au long du circuit, ainsi que la confiance et la foi des Coptes, pour qui la terre d’Égypte est une terre choisie entre mille, marquée pour toujours par le sceau de la Sainte Famille.