On en a entendu de toutes sortes à propos du mariage gay ces jours derniers. Cela signifie-t-il qu’un véritable débat se fait jour ? Pas le moins du monde ! Des critiques du projet de loi gouvernemental sur « le mariage pour tous » mettent sans cesse en avant toutes sortes d’excellentes raisons de le refuser et personne ne répond.
Les ministres ont simplement déclaré qu’ils étaient heureux de permettre à chacun d’exprimer son opinion, mais les partisans des familles à deux pères ou deux mères ne se soucient pas d’argumenter. Ils croient apparemment qu’un droit aussi évident n’a pas besoin d’être justifié. Il doit être reconnu, disent-ils, ça ne se discute pas. C’est pourquoi aucun officiel, ni aucun partisan de la loi n’a daigné se pencher sur les objections détaillées présentées par des cardinaux, des évêques, des imams, des rabbins et même des personnalités et organisations non-religieuses. Dans l’ensemble, les médias trouvent de tels raisonnements trop subtils : on ne peut pas les résumer en un titre accrocheur, le public s’ennuierait si on reprenait tout point par point.
Inversement, l’idée que n’importe qui puisse épouser n’importe qui est basée sur un principe simplissime que tout honnête homme saisira et adoptera d’emblée : toute forme de discrimination est mauvaise. Refuser le mariage aux gays et lesbiennes qui le désirent revient alors à ne pas les reconnaître comme des êtres humains. C’est par conséquent moralement inacceptable, une manifestation de cette homophobie qui a été déclarée un crime tellement atroce que la prévention en est faite dès la petite section de maternelle.
Il est aussi avancé que plusieurs États américains et européens ont déjà ouvert le mariage aux gays et lesbiennes et que la France doit se rattraper en vue de rester, parmi les pays les plus avancés, le porte-étendard de l’égalité et de la justice.
Une autre excuse pour esquiver de débattre sérieusement des objections est que le mariage gay faisait partie du programme du candidat Hollande. Puisqu’il a été élu président, on en conclut que la majorité a approuvé cette idée et qu’il serait anti-démocratique d’y revenir.
Comme les opposants (notamment les catholiques) commencent à manifester en masse parce que le débat rationnel s’est montré impossible à mettre en place, une quatrième forme de refus apparaît : une pression politique de ce genre est présentée comme anormale, parce que défiler dans la rue en chantant des slogans est réservé aux progressistes et aux défenseurs des opprimés, et que pour des conservateurs et réactionnaires, c’est contre nature…
L’incongruité serait plutôt qu’un gouvernement de gauche ait à céder devant des contestataires occupant pacifiquement la rue. Il y a eu un précédent cependant : en 1984, après qu’un million de manifestants se sont rassemblés à Paris, un autre président socialiste prénommé François a été forcé de renvoyer son premier ministre et son gouvernement et de retirer son projet de nationaliser toutes les écoles privées, pour la plupart catholiques.
Hollande n’a aucune certitude de faire mieux que Mitterrand. L’exécution de sa promesse de légaliser « la mise à mort miséricordieuse » a été repoussée, officiellement pour laisser le temps à un comité d’experts de creuser la question et d’écrire un rapport détaillé dont personne n’osera contester les conclusions.
Les partisans de l’euthanasie sont manifestement plus patients que les champions du « mariage homosexuel ». La détermination aveugle de ces derniers est un autre paradoxe – et un vrai : à une époque où le mariage a perdu de sa popularité, où garçons et filles se marient tard ou pas du tout, même quand ils ont des enfants, et divorcent encore plus souvent, il est ironique de voir une « avant-garde » réclamer le droit à profiter d’une institution aussi vieillotte.
Il y a plus : on ne trouve pas d’unanimité à gauche, même parmi les groupes homosexuels. Leurs alliés habituels, les bi et les transsexuels, se sentent manifestement peu concernés, si bien que le lobby LBGT se disloque, tandis que la base socialiste, qui voit des priorités plus urgentes, est perplexe et divisée. Pour être honnête, quelques voix en faveur des droits des homosexuels se font entendre dans l’opposition gaulliste.
Avec un peu de recul, il apparaît qu’une petite élite « éclairée » s’est auto-persuadée et a persuadé une poignée de politiciens craignant de paraître rétrogrades que les unions homosexuelles sont l’inévitable nouvelle étape de la modernisation de la vie sociale et de la croissance des libertés civiles, après le suffrage universel, l’abolition de l’esclavage, la condamnation du racisme et du sexisme, le divorce et le contrôle des naissances. Parce qu’elle s’enracine dans la foi illusoire dans le « Progrès », cette croyance est imperméable à tout raisonnement et elle aura recours à des caricatures de valeurs et à des arguments contradictoires pour s’imposer, sans même daigner révéler ses véritables motivations ni examiner les conséquences.
Dans le cas présent, la crainte de ne pas être « dans le vent » est utilisée pour imposer dans les foyers l’idée que l’homosexualité est « normale ». Le but inavoué est de vaincre la répugnance instinctive, surtout chez les adolescents. La perspective des étapes suivantes ne donne pas seulement la nausée, elle est tout bonnement révoltante. Le poète Paul Valéry disait que les civilisations pouvaient mourir. Il semblerait que la nôtre envisage de se suicider.
Une question se pose : combien de temps les gens vont-ils supporter d’être manipulés et traités comme des abrutis par des fous furieux se prétendant philanthropes ? Il n’est pas vrai que François Hollande a été élu parce qu’il a promis de légaliser les unions homosexuelles : les Français ont simplement rejeté de peu le président sortant. L’égalité ne signifie pas qu’hommes et femmes soient interchangeables. L’espérance d’un avenir meilleur ne passe pas par la dénaturation du mariage mais par un pari sur la raison. Les responsables religieux ont fait leur devoir en pointant les prévisibles effets désastreux de la légalisation du mariage homosexuel. Au tour du peuple d’achever le travail en rendant clair pour la classe politique que ce n’est certainement pas la sorte d’avancée dont il a besoin.
Source : http://www.thecatholicthing.org/columns/2012/the-french-debate-on-gay-marriage.html
Pour aller plus loin :
- Mariage gay : Trente-deux à zéro pour le mariage "vrai de vrai".
- Le problème du mariage et sa solution
- Les musulmans en faveur du « mariage » homosexuel
- La paternité-maternité spirituelle en vie monastique est-elle menacée en Occident ?
- France : disparition du mariage… et sa renaissance ? (France Destroys Marriage, then Saves It ?)