Au terme de leur 83e rassemblement, qui s’est tenu à Lyon, les Semaines Sociales de France ont publié un communiqué résumant leurs travaux et leurs vœux. Elles se félicitent de l’évolution qui permet au religieux d’être admis dans le domaine public, à l’encontre du préjugé tenace qui voudrait le maintenir au seul for interne. Ainsi une coopération nouvelle et fructueuse devrait s’instaurer entre les croyants, leurs communautés et les diverses instances de la société civile. Il semble donc que le débat ait progressé et que l’horizon s’éclaircisse. Pourtant, lors des Semaines, diverses craintes ont été exprimées, légitimant les préventions à l’égard d’une Église qui ne serait pas assez humble face aux réalités diverses du monde. Faudrait-il donc se méfier de la tentation cléricale de reprendre le pouvoir sur la société, l’État, la science
Le communiqué final écarte cette menace « es religions se savent minoritaires et ne prétendent plus, en tout cas, exercer sur la vie publique un quelconque pouvoir ». Ce type de formule n’est pas sans poser quelques questions. Qu’entend-on par pouvoir S’il s’agit de reconnaître, comme l’a rappelé le cardinal Barbarin, le principe de la séparation du politique et du religieux, il ne devrait pas y avoir d’ambiguïtés. L’évolution historique moderne a fait que les institutions publiques sont sécularisées. Il serait d’ailleurs absurde de vouloir leur rendre un statut confessionnel, dès lors qu’elles sont dirigées par un personnel étranger à la foi ou, pour le moins, très mêlé du point de vue des convictions. Par ailleurs, l’obtention pour l’Église d’une liberté entière par rapport à l’État est un acquis considérable.
Cependant, il serait naïf de penser que l’autorité spirituelle en soi n’a pas de pouvoir sur la société, autrement dit d’influence, avec des moyens adaptés pour se faire entendre et comprendre. Il y a une nécessaire visibilité de l’Église et de son message qui ne saurait rester sous le boisseau, mais, selon l’Évangile, doit rayonner du haut de la montagne pour éclairer tous les hommes. Nous vivons dans une société de communication qui, loin d’être neutre, comme l’ont montré les « médiologues » comme Régis Debray et Lucien Sfez, est forte d’une idéologie, qui a sa propre connotation religieuse. Dans ce cadre, il y a forcément conflit de pouvoirs. Il faut souhaiter que celui exercé par l’Église soit conforme à l’exousia dont parle l’Évangile, c’est-à-dire une autorité qui s’exerce pour éclaircir, fortifier, libérer, et non pas tromper, décourager, enchaîner aux préjugés et aux puissances d’illusion. Ce ne peut être que le fruit d’un combat spirituel intense, au service de l’intégrité des personnes et du bien de tous.
Gérard LECLERC
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