Évoquant hier l’affaire dite Mila, du nom de cette jeune fille gravement menacée dans sa sécurité pour invective envers la religion musulmane, je me suis risqué à quelques considérations sur la notion de blasphème et la liberté de critique en matière de religion. Quelques amis m’ont interpellé à ce sujet, jugeant que je n’avais pas resitué les propos de Mila dans leur contexte, qui est celui d’un véritable harcèlement et d’un déchaînement de haine. De ce point du vue, ils ont tout à fait raison. L’exaspération de Mila ne se comprend pas sans connaissance précise de sa situation d’adolescente poussée à bout par un entourage insupportable, bientôt relayé par une orchestration qui aggravait considérablement les choses.
J’espère n’avoir pas donné l’impression de supporter ce lynchage moral. Peut-être n’ai-je pas affirmé suffisamment ma compassion pour cette jeune fille en m’évadant trop vite dans des considérations que je ne renie en rien mais qui avaient le défaut de m’éloigner de la singularité d’une situation personnelle. J’observe par ailleurs les commentaires de personnalités qui me sont souvent très proches et qui expriment leur colère à l’égard de la complaisance dont bénéficie l’islamisme de la part de ceux que paralyse la simple peur d’être accusés d’islamophobie. Je ne puis que les approuver, tant il est vrai que règne une inconscience totale de la part de ceux qui semblent ignorer les dégâts de l’islamisme dans des quartiers que François Hollande considère en état de sécession. L’ancien maire de Sarcelles, François Pupponi, vient de publier un essai vigoureux à ce sujet où il dénonce l’aveuglement de beaucoup à l’égard des déflagrations en puissance qui risquent de dépasser la violence des émeutes de 20051.
Donc la lucidité se doit d’être entière. Autre chose est pourtant l’appréhension intellectuelle du phénomène islamique par rapport à la complexité de l’islam. Est-ce en jouant de la surenchère et de l’emploi du blasphème qu’on règlera la difficulté ? René Girard nous a trop mis en garde contre les ravages du mimétisme pour ne pas céder à la tentation des échanges d’invectives. En ce sens, on plaide souvent en faveur d’une laïcité apaisée. On devrait plaider aussi en faveur d’une laïcité intelligente.