Plusieurs signaux récents – le déploiement d’observateurs internationaux, la visite d’un représentant de l’OTAN – semblent indiquer un début de prise de conscience face à la situation des Arméniens du Karabagh. Qu’en est-il vraiment ?
Tigrane Yégavian : Lors des attaques conduites en septembre dernier par l’Azerbaïdjan contre la République d’Arménie souveraine, il n’y a pas eu de mobilisation pour dénoncer cette agression, en particulier de la part de la Russie, et encore moins de sanctions. Seul Emmanuel Macron est intervenu pour entreprendre une action concertée. L’envoi d’observateurs est sans doute le fruit de cette intervention. Néanmoins, ils ne sont déployés que du côté arménien, pas du côté azéri. Dès lors, je ne vois pas très bien quelle est la différence entre ces observateurs et les journalistes qui suivent sur place le conflit.
Vous déplorez l’absence de sanctions contre l’Azerbaïdjan. Lesquelles seraient les plus efficaces ?
Il est en effet stupéfiant de constater que les agissements de Bakou n’ont donné lieu à aucune mesure coercitive. La première sanction à mettre en place serait le gel des avoirs azéris en Europe et l’embargo sur les importations de ressources énergétiques. Sur ce point, on assiste à une immense tartufferie. Tout porte en effet à croire que l’Azerbaïdjan vend à l’Europe un gaz qui est en fait d’origine russe, acquis à bas coût et revendu avec de juteux profits. Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, joue un jeu trouble puisque, tout en condamnant Vladimir Poutine, elle valide ces importations de gaz qui font le jeu de l’authentique dictature qu’est l’Azerbaïdjan. Elle suit en cela l’agenda de l’Allemagne et laisse la France singulièrement isolée sur ce dossier.
Concrètement, quelle est la situation humanitaire sur le terrain ?
Depuis le 12 décembre, plus aucune marchandise ne peut parvenir au Karabagh. La population arménienne y est privée de tous les biens de première nécessité, comme les aliments ou les médicaments. De pseudo-militants écologistes azéris bloquent le corridor de Latchine, au prétexte de réclamer la fermeture des mines du Karabagh, jugées polluantes. Et même si la présence d’agents azéris parmi ces manifestants a été documentée, les Russes, censés sécuriser la zone, ferment malheureusement les yeux. On assiste là à une forme de terrorisme humanitaire dont l’objectif est clair : vider le Karabagh de sa population arménienne. En d’autres termes, c’est du nettoyage ethnique. C’est un plan cohérent.
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