Le père Schall à 91 ans : un rapport provisoire - France Catholique
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« Ô Marie conçue sans péché »
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Le père Schall à 91 ans : un rapport provisoire

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Le Père Schall, S.J., auteur de nombreux articles pour The Catholic Thing nous a quittés le 17 avril. Voici la traduction d’un de ses derniers articles (du 12 janvier 2019.)

R.I.P.


Permettez que je commence par mes remerciements pour les nombreux vœux et prières bien reçus de tant de lecteurs. Je suis profondément touché et reconnaissant. Bien que s’attendant à se trouver dans l’au-delà, Schall tient le coup. L’opération du côlon a réussi, le patient survit, mais moins confortablement que naguère.

C’était la quatrième opération importante subie en neuf décennies — le compte y est. La question fondamentale qu’on se pose en cas de maladie ou d’accident n’est pas « Pourquoi moi, Seigneur ? ». On ressent plutôt le silence de Dieu à notre égard. Chacun d’entre nous existe avec un destin, peut-être même plusieurs destins. L’idée même du jugement final comporte l’inclusion telles destinées dans la réalité.

Selon Ignace de Loyala, nous avons été créés pour louer, révérer, et servir Dieu, et ainsi gagner le salut de nos âmes.Atteindre ou non cet objectif dépend des facultés que Dieu a attribuées à nos personnes. Nous sommes conscients de nos fautes, il n’y a donc pas de chemin tout tracé devant nous vers la gloire si ce n’est par le pardon de ce que nous ne donnons pas par nous-mêmes.

Et pourtant, j’ai trouvé une aide précieuse dans la prière dite “Prière de Jésue “ — « Jésus, Fils du Père Éternel, aie pitié de moi pauvre pécheur. ». On prie souvent au cours de la vie, à juste titre, pour les autres. Mais aux moments de solitude, à la poursuite du sommeil ou de la sérénité, à la recherche d’une forme de quiétude, on sent qu’on éprouve le besoin de la prière pour soi.

Chacun, nous avons été créés pour participer à la vie éternelle de la Divinité Trois-en-Un. Le lien entre la vie ici-bas et le futur nous semble parfois bien net. Mais il ne nous est pas donné de saisir toute la réalité de ce lien. Nos pensées nous incitent à en comprendre toute la signification.

Sur un autre plan se trouve ce que j’appellerai le “problème d’orthodoxie “. Le centre est-il stable ? J’ai été longtemps persuadé par la vision de Chesterton sur la constance de Rome quant à la diffusion de la foi et de la raison. C’était le recueil de foi et raison qui se perpétuait au cours des âges.
Il semble à présent que le centre de notre Église bafouille. Nous ne sommes pas persécutés, au moins en apparence. Les problèmes au sein de l’Église semblent se trouver dans son évolution. Nous sommes plus que dubitatifs. Le souci de l’éternité semble un problème secondaire pour un “Messie sur terre“ qui nous apporterait le bien-être en ce bas-monde.

Nous prétendons que rien d’important ne survient. Et cependant il y a bien des preuves que de larges écarts se produisent parmi nous. Cette limpide ligne de pensée d’Aristote à Thomas d’Aquin, puis à Benoît semble désarticulée. L’orthodoxie impliquait la certitude que ce qui nous était transmis ne changerait pas, ni ne deviendrait incompréhensible.. De même, que la raison nous montrerait que la révélation est compatible avec ce que nous pouvons apprendre par nous-mêmes. Les vérités de Dieu sont en vérité la raison même.

À dire vrai, si ce qui est révélé et ce qu’on comprend ne sont plus cohérents, alors la promesse fondamentale à laquelle nous sommes attachés pour la stabilité de la doctrine et de la pratique ne tiendra pas.

La remarque de Belloc :  « Bizarre, le choix des Juifs par Dieu » se lit : « Bizarre, Dieu a laissé un tel problème se poser parmi nous. » On nous redit fréquemment que : « Mes voies ne sont pas vos voies. » Ce qui est plutôt rassurant.

J’ai souvent noté du temps de Jean-Paul II et de Benoît que le Catholicisme n’a jamais été intellectuellement plus fort et culturellement plus médiocre. Ce net écart intellectuel me semble atténué. Le Dieu de foi et raison semble intact. Mais le monde n’est pas converti. Il nous appelle à grands cris, venez, comportez-vous en humains, et oubliez l’Homme Crucifié envoyé parmi nous, oh ! Voici tant d’années.

Il se trouve que le Christ parlait sérieusement de notre connaissance et de notre respect des commandements. Socrate avait raison. Il n’est jamais bien de mal agir. Certains actes sont intrinsèquement mauvais. Prétendre qu’ils sont bons mène à la ruine de l’âme. Nous voyons bien chaque jour qu’aucune faute n’est oubliée, même si elle peut être pardonnée.

Dieu a créé le monde selon Son projet. Nous en faisons partie, chacun d’entre nous. Selon moi, la prière tient toujours du dogme. La prière est aussi la recherche de la vérité. Seule la prière nous rend libres. Nous prions également pour beaucoup d’autres. Nous prions aussi pour l’Église, qu’elle demeure le pont entre ce monde et le monde à venir.

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Vieillard en prière – École de Rembrandt, première moitié du XVIIème siècle – Musée des Beaux-Arts, Boston.

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Source : https://www.thecatholicthing.org/2019/01/12/schall-at-91-an-interim-report/