C’était hier la Journée mondiale du refus de la misère. Sait-on que c’est un prêtre catholique français, le père Joseph Wresinski, qui est à l’origine de cette Journée ? Il avait inauguré, le 17 octobre 1987, une dalle commémorative des victimes de la misère, scellée sur le parvis des droits de l’homme place du Trocadéro à Paris. Son initiative avait été reconnue par les Nations unies en 1992. Extraordinaire figure que celle de ce prêtre, né dans une famille pauvre à Angers, et qui avait entendu très jeune l’appel au sacerdoce. Les premières fois que son nom a été prononcé devant moi, c’était dans mon diocèse natal de Soissons, car il avait intégré son grand séminaire au début de la guerre et avait été ordonné dans la cathédrale de cette ville. Ceux qui m’en parlaient avaient été impressionnés par sa personnalité, sa générosité mais aussi son audace. Ils riaient au souvenir de ses aventures où il bravait les conventions avec un sacré culot.
Je ne l’ai pas connu personnellement, mais averti de qui il était, je m’étais rendu à ses obsèques célébrées par le cardinal Lustiger à Notre-Dame de Paris. La cathédrale était pleine d’une foule inhabituelle, celle précisément que Joseph Wresinski avait servie de toutes ses forces pour faire reconnaître sa dignité. J’ai encore en tête le vigoureux discours prononcé par Philippe Séguin, alors ministre des Affaires sociales, assurant que son pari serait gagné parce que l’impulsion qu’il avait donnée avait été décisive. Emmanuel Macron semble bien avoir reçu le message, puisque hier il a voulu lancer son propre plan contre la pauvreté, en ciblant notamment l’enfance et la jeunesse.
Une phase de concertation est ouverte qui devra aboutir au printemps prochain, avec la définition d’une stratégie adaptée. C’est un impératif de premier ordre si l’on songe que le taux de pauvreté est, en France, estimé autour de 14 % et qu’il monte même jusqu’à 20 % chez les jeunes. L’examen des statistiques montre que nous ne sommes pas les plus touchés en Europe, sans doute grâce à notre système de protection sociale. La prospère Allemagne compte beaucoup plus de pauvres que nous. Le père Wresinski, dont la cause de béatification est ouverte, continue à nous rappeler que la lutte contre la pauvreté conditionne aussi notre propre dignité.
Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 18 octobre 2017.
Pour aller plus loin :
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- Vladimir Ghika : le contexte politique avant la guerre de 1914-1918
- Liste des ouvriers pastoraux, Evêques, Prêtres, Religieux, Religieuses et Laics tués en 2011 et 2010
- LA « MODERNITÉ » : UN CENTENAIRE OUBLIÉ
- Jean-Paul Hyvernat