Le père Hyde et le mystère du Mal - France Catholique
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Marie dans le plan de Dieu
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Le père Hyde et le mystère du Mal

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J’étais à mon bureau, dans le séminaire où j’enseignais, lorsque le téléphone se mit à sonner. Je décroche et suis agressé par un feu roulant de grossièretés. Après que l’appelant s’est calmé, il explique qu’il vient de lire un article que j’ai écrit plusieurs mois auparavant à propos d’un prêtre que j’ai connu lorsque j’étais enfant de chœur dans une petite église de Nouvelle Angleterre.

Le père « Smith » était le vicaire de la paroisse dont j’ai servi les messes cinquante ans avant cet appel téléphonique. Dans l’article que j’avais écrit, je remerciais le père Smith pour son excellent service de prêtre et son impact totalement positif sur moi. Pendant tout le temps que j’ai passé comme enfant de chœur, j’ai été très impressionné par le père Smith.

Il fut muté juste avant que j’entrasse au lycée en 1960. Lycée, faculté, armée, début de la vie de mariage, troisième cycle puis l’enseignement en faculté se sont succédé rapidement. Je n’avais jamais remercié le père Smith et lorsque j’ai fini par y penser, il était mort.

J’ai tout de même écrit, après sa mort, pour exprimer publiquement combien j’avais apprécié ce bon prêtre qui prit part à mon enfance idyllique : des parents merveilleux, de bons prêtres et de bons professeurs, le baseball, la bicyclette, les livres et, le moment venu, une épouse de la même ville que moi.

J’avais écrit que le père Smith était un loyal fils de l’Église. Dans ma paroisse, tout le monde l’aimait. Il traitait les enfants de chœur avec respect, bonté et bonne humeur. Par exemple, si je faisais des erreurs en servant la messe, il me corrigeait patiemment. Il était là pour toute personne dans le besoin, conseillant, célébrant, consolant, baptisant, mariant, faisant des visites dans les hôpitaux et présidant aux veillées funèbres et aux obsèques.

Puis mon interlocuteur me dit que le père Smith était un violeur ; lui-même faisait partie des garçons que le père Smith avait violés.

Cela était complètement hors de mon entendement. Pendant les six ans que nous l’avions connu dans notre petite ville, il n’y avait pas eu le moindre incident ni la moindre manifestation d’éphébophilie (l’attirance sexuelle d’un adulte envers un adolescent) dont le père Smith était maintenant accusé.

On dit que le père Smith faisait partie d’un cercle – nom terrible – de prêtres qui emmenaient des adolescents camper à la campagne, les manipulaient avec de la boisson, de la drogue et de la pornographie, puis avaient des relations sexuelles avec eux. Pire, le successeur du père Smith dans mon ancienne paroisse était également cité comme faisant partie de ce cercle.

Bien maigre était la consolation d’apprendre que cette abominable activité s’était passée une vingtaine d’années après que je fus enfant de chœur.

Je pensais, et je le dis à mon interlocuteur, que les accusations ne pouvaient être vraies.

Mais elles l’étaient, confirmées par diverses sources crédibles et par le témoignage personnel de gens que j’avais connus des années auparavant.

Mon esprit a chancelé. Comment ce prêtre si pieux avait-il pu participer à de telles débauches, de telles félonies, de tels péchés mortels ? Le père Smith ? Le dévot, gentil, sincère, affable père Smith ?

Je ne sais pas. Je ne saurai jamais. Je me souviendrai toujours du père Smith à la messe, se tournant vers l’assemblée et disant Dominus vobiscum, invoquant l’aide de St Michel archange contre la méchanceté et les pièges du diable, son évidente dévotion envers Notre Seigneur et Son Église.

Dans le film La canonnière du Yang-Tse, Steve McQueen joue le rôle du marin Jake Holman, de la marine américaine, qui, après une mésaventure en Chine, tombe dans un piège ; juste après qu’on lui a tiré dessus, il demande : « Que diable s’est-il passé ? »

Il y a presque soixante ans depuis que j’ai vu le père Smith, qui m’avait une fois incité à considérer la prêtrise (je ne suis pas devenu prêtre). Il priait la messe avec beaucoup de respect, il était visiblement dévot dans ses enseignements et dans ses prêches, il était gentil et aimable, plutôt drôle, c’était un prêtre exemplaire. J’ai toujours la mémoire affectueuse de quelqu’un que je connaissais comme un saint prêtre et un homme bon.

Nous autres écrivains sommes censés avoir des réponses aux questions que nous posons. Eh bien, je n’ai pas de réponse concernant le père Smith. Je ne comprends pas. Je suis toujours abasourdi par ce mystère d’iniquité (2 Th 2, 7).

Je sais, comme le dit l’adage, que Corruptio optimi pessimum est (« la corruption des meilleurs est la pire des choses ». Nous comptions sur le père Smith et son respect du sacré, et nous avons reçu le profane ; de la vertu, et nous avons eu le vice ; de la pureté, et nous avons eu la perversion. Il était appelé à être digne de ses fonctions (cf. Ep 4, 1). Mais il a trahi ses promesses et sa prêtrise. Les vœux et le potentiel de prêtre du père Smith ont d’une façon ou d’une autre dégénéré en la malfaisance morale du plus mauvais père Smith.

Nous prions bien sûr avec ferveur pour toutes les victimes du mal. Je pense également au père Smith de temps et temps, et je prie pour le repos de son âme. Il a été un si bon prêtre en paroisse, avec une si bonne influence, qu’au moins un de ses anciens enfants de chœur le recherche des années après pour lui dire merci. Il doit avoir fait beaucoup de bien (dont je me souviens), ainsi que beaucoup de mal (dont, Dieu merci, je n’ai pas été le témoin ni n’ai rien entendu dire lorsqu’il servait dans ma paroisse).

Vers la fin de sa vie, a-t-il pensé aux nombreuses façons dont il a trahi ses vœux solennels de prêtre, et à ceux qu’il a si cruellement violés ? Lorsqu’il est mort d’une maladie cardiaque, s’est-il repenti (CEC §982) ? Et s’est-il demandé, a-t-il demandé à Dieu, au moment de sa mort : « Que diable s’est-il passé ? »

Je prie pour qu’il l’ait fait.

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Source : https://www.thecatholicthing.org/2017/10/22/father-hyde-and-the-mystery-of-evil/

Le diacre James H. Toner, docteur en philosophie, est professeur émérite de direction et d’éthique à l’École de guerre de l’armée de l’air des États-Unis et auteur de Morals Under the Gun (« La morale sous les drapeaux ») et d’autres ouvrages. Il a également enseigné à Notre-Dame, Norwich, Auburn, l’École de l’air américaine, et au Séminaire & Université des Saints Apôtres.