« Le pape François. Un homme de parole », en salle le 12 septembre. - France Catholique
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« Le pape François. Un homme de parole », en salle le 12 septembre.

On a le droit de ne pas être d’accord tout le temps avec ce Pape atypique qui dirige l’Église depuis maintenant cinq ans. Cependant, quand un immense cinéaste comme Wim Wenders signe un documentaire sur lui, il ne faut surtout pas le rater.
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Malgré leur notoriété, les papes des dernières décennies ont rarement intéressé les grands cinéastes, si l’on excepte, bien sûr, Nanni Moretti, en 2011, avec son excellente fiction Habemus papam, qui mettait en scène la solitude d’un pape (magistralement interprété par Michel Piccoli) au moment de son élection, et ses doutes sur ses capacités à occuper cette fonction, et, bien sûr, l’Espagnol Beda Docampo Feijóo, qui a signé, en 2015, Le pape François, une superbe biographie. Aussi est-ce avec curiosité que l’on découvre ce film, présenté hors compétition au dernier Festival de Cannes et signé d’un des plus grands cinéastes de notre époque.

Issu d’une famille d’immigrés italiens, Jorge Mario Bergoglio est né le 17 décembre 1936 à Buenos Aires. Après avoir obtenu un diplôme de technicien en chimie, il intègre la Compagnie de Jésus en 1958 et est ordonné prêtre en 1969. Après avoir été maître des novices, à San Miguel et professeur à la faculté de théologie, il est élu provincial des jésuites d’Argentine, en 1973. C’est Jean-Paul II qui le nomme évêque auxiliaire de Buenos Aires en 1992 et archevêque en 1998 ainsi que primat d’Argentine. Il a été élu pape le 13 mars 2013.

On se souvient que cette élection a fait l’effet d’un coup de tonnerre dans le monde, qu’il soit catholique ou non. Premier pape originaire d’Amérique du Sud et premier pape jésuite, ce nouveau pape a été également le premier à choisir le prénom de saint François d’Assise. Surtout, depuis son élection, il a fait preuve d’un comportement et d’une liberté de parole qui tranchent avec les traditions ancestrales du Vatican, ce qui n’est pas sans perturber certains.

Est-ce pour cette raison que don Dario Edoardo Viganò (à ne pas confondre avec Mgr Carlo Maria Viganò au cœur d’un récent scandale), ex-chargé de communication au Vatican et ancien responsable de la chaîne CTV (Centre de Télévision du Vatican) a demandé à Wim Wenders (Paris Texas, Les ailes du désir, The Million Dollar Hotel, Buena Vista Social Club, Pina, Le sel de la Terre), dont de nombreux films ont été nommés aux Oscars, de réaliser un documentaire sur le pape François, coproduit par le Vatican ?

Le cinéaste, né le 14 août 1945 à Düsseldorf, en Allemagne, au sein d’une famille bourgeoise et catholique, qui a envisagé un temps, tout comme le réalisateur américain Martin Scorsese, d’entrer au séminaire, s’est détourné de la religion en devenant athée, avant de se convertir au protestantisme de l’Église presbytérienne. Pourtant, cela ne l’a pas empêché d’accepter cette proposition, d’autant plus que le Vatican lui a donné carte blanche, ainsi qu’un accès libre à toutes les archives filmées du Vatican.

Comme il le dit lui-même : « Le 13 mars 2013 a été une journée exaltante (…). Comme moi, beaucoup de personnes sur la planète ont placé les plus grands espoirs en ce pape qui a choisi un patronyme qui, en lui seul, constitue déjà une promesse. » C’est dire si la personnalité de François fascine le metteur en scène, dont tous les films, en particulier Les ailes du désir, qui met en scène un ange gardien qui tombe amoureux de la jeune femme sur laquelle il est chargé de veiller, sont imprégnés d’une forte dimension spirituelle.

Mais son film n’est ni une biographie ni un portrait, plutôt une rencontre avec un homme charismatique et « un voyage initiatique dans l’univers du Pape », comme le dit Wim Wenders.

C’est ainsi que l’œuvre est construite à partir de quatre longues interviews filmées à l’intérieur et dans les jardins du Vatican, et fondées sur des centaines de questions venant de gens de tous les pays et de tous les horizons, auxquelles le Pape répond sans notes ni prompteur. Les questions ont d’ailleurs été coupées au montage, afin de laisser libre cours à la parole du Pape. Ces interviews ont été réalisées à l’aide de plusieurs caméras et avec un procédé remarquable, celui de l’Interrotron, qui consiste à installer, au-dessus d’une caméra, un écran, sur lequel se trouvent des images du réalisateur que l’interviewé regarde dans les yeux, ce qui a pour effet que celui-ci s’adresse aux spectateurs en les regardant droit dans les yeux, instaurant ainsi une belle proximité avec eux.

Les interventions du Pape sont entrecoupées d’images d’archives le montrant lors de ses nombreux voyages, en Asie, en Amérique latine, en Afrique, aux Nations unies, au Congrès américain, sur le mémorial du World Trade Center, à Yad Vashem à Jérusalem, etc., mais aussi et surtout auprès des immigrés de Lesbos, des pauvres des favelas de Rio, et réconfortant des malades, lavant les pieds de prisonniers, etc.

Enfin, des images sans paroles, retraçant brièvement la vie de saint François d’Assise, émaillent le film et soulignent parfaitement bien le lien très fort qui existe entre le Poverello d’Assise et le Pape qui a emprunté son nom. Pour cela, Wim Wenders a utilisé une caméra datant de 1920, ce qui confère à ces scènes en noir et blanc une texture qui donne presque l’impression qu’il s’agit d’images d’archives ou d’extraits d’un film des années 50. Ces courtes scènes montrent bien la filiation qui existe entre ce Pape, dont la spiritualité vient de saint Ignace, et saint François d’Assise, qui a passé sa vie à aider les pauvres et qui aimait la nature et la respectait car c’était une création divine.
C’est ce mélange entre les trois qui fait la force de ce film magnifique, aussi drôle qu’émouvant, qui permet au successeur de Pierre de transmettre l’essence du message du Christ, en s’adressant directement à tous les hommes, qu’ils soient croyants ou non.

Pourtant, ce film exceptionnel a provoqué de nombreuses critiques, chez les catholiques comme chez les athées.

Le plus gros reproche qui est fait à ce film est qu’il est hagiographique. Ce serait comme une sorte de film de propagande pour une campagne électorale. En effet, on constate que personne ne vient contredire le Pape, aucun intervenant extérieur n’apparaissant dans le film, et il n’y a pas de commentaire, mis à part quelques rares phrases de Wim Wenders. Certes, on peut comprendre que cela puisse dérouter, mais la démarche du réalisateur n’était pas de faire un documentaire classique  : « J’ai voulu que les idées du Pape et son message soient au centre de ce documentaire, au même titre que son travail, les réformes et les réponses qu’il propose aux problèmes actuels. » Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il a parfaitement réussi ce dessein, en s’effaçant derrière son sujet. Après, libre à chacun de ne pas être d’accord avec telle ou telle des phrases du Pape.

Le cinéaste presbytérien porte un regard qui ne peut pas être neutre, car il est conditionné par ce qu’il pense profondément de la papauté. Et c’est ce que certains catholiques lui reprochent et se demandent s’il n’est pas fasciné par ce Pape en raison de sa singularité et du fait qu’il est différent de ses prédécesseurs, en particulier de Benoît XVI et de Jean-Paul II. Mais c’est précisément cela qui fait l’intérêt du film, car, les raisons de cette fascination sont intéressantes à étudier, d’autant plus qu’elles apparaissent clairement, qu’il s’agisse des interventions du Pape sur différents sujets et des scènes le montrant à l’écoute des plus petits. Surtout, faute d’intervenants extérieurs, le regard du cinéaste n’est guère présent, même s’il peut apparaître à travers le montage qui lui permet de mettre en valeur ce qui l’a touché chez ce Pape et nous fait ainsi entrer au cœur de la personnalité d’un homme qui ne respire que l’Évangile. Et ça, c’est très fort.

Certaines critiques regrettent que le film ne montre pas le Pape comme chef de l’Église et mette en valeur un message humaniste mais pas spirituel, sans oublier ceux qui estiment qu’il donne des leçons sans aller jusqu’au bout et sans indiquer la manière de faire. Pourtant, même si, sur le plan international, le Pape est un chef d’État, dans la réalité, il n’est pas un homme politique ni un technicien. Il est là pour apporter un éclairage, spirituel, mais également humain, mais il n’est pas chargé de la politique à mettre en œuvre. Par exemple, ce n’est pas lui qui va dire à l’État italien comment il doit procéder en matière d’immigration. Il est là pour témoigner du malheur des gens, de la pauvreté, de la justice sociale, etc. Par exemple, avec un message simple, il parle de l’importance des trois « T » : un travail, de la terre et un toit, nécessaires pour tout individu. Surtout, quand on le voit avec les malades, les handicapés, les prisonniers, les pauvres, etc., c’est le Christ de l’Évangile que l’on voit. Il ne faut pas oublier que, très souvent, l’humanisme moderne ce sont les Droits de l’homme, les grandes idées, etc., ce n’est pas le regard du Christ sur chaque personne. Avec François, et cela apparaît très clairement dans le film, c’est chaque visage qui compte, ce ne sont pas les grandes idées. Chaque personne est considérée comme elle-même, avec le regard que porte sur elle le Christ. En résumé, ce film rend compte de l’essence du message du Christ, de son universalisme, de ce message d’amour, de respect et d’attention à l’autre. C’est la raison pour laquelle du début jusqu’à la fin, on est transporté par ce film. D’autant plus, qu’à côté de moments émouvants, il y en a d’autres qui sont d’une drôlerie irrésistible, pleins de malice et d’humanité. Tel ce rappel de la phrase attribuée à saint Thomas More : « Donne-moi, Seigneur, une bonne digestion, et aussi quelque chose à digérer. »

On pourrait même dire que ceux qui n’aiment pas ce film sont ceux qui n’aiment pas le Pape et vont donc lui trouver tous les défauts possibles. Pourtant, quand on va voir un film comme celui-là, il faut être dans une certaine disposition d’ouverture, sans préjugé. La même disposition que l’on devrait avoir face à tous les êtres humains et qui permettrait de trouver des qualités, même chez ceux dont on ne partage pas du tout les idées. On le sait, quelqu’un qui est 100 % insupportable, cela n’existe pas, car il y a toujours quelque chose de positif dans chaque individu. En fait, ce film s’adresse essentiellement au cœur du spectateur, tout comme le Christ s’adressait au cœur des hommes.

Le plus frappant dans ce film, c’est que ce n’est pas une œuvre faite pour les catholiques, mais pour tous les humains, qu’ils soient chrétiens, juifs, musulmans, bouddhistes et même athées. Quiconque ira voir ce film peut être ému par cet homme, et cela peut lui apprendre des choses sur sa vie personnelle, sans pour autant qu’il en arrive à se convertir. De même que n’importe quel humain qui aurait rencontré le Christ, à l’époque de sa venue sur Terre, aurait été complètement transformé par cette rencontre. Si l’on y réfléchit, cela devrait être le cas des chrétiens qui devraient, par leur comportement et leur parole, être capables de transformer les gens qu’ils rencontrent. C’est loin d’être le cas, malheureusement, mais ce film témoigne, de façon magistrale, que c’est possible. En conclusion, Le Pape, un homme de parole est un film magnifique, avec une belle épaisseur humaine et spirituelle, qui inspirera, à n’en pas douter, maints spectateurs.

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Documentaire franco-germano-helvético-italien (2018) de Wim Wenders, avec le pape François (1h36). (Adolescents)

http://www.allocine.fr/film/fichefilm_gen_cfilm=256396.html

https://www.parismatch.com/Culture/Cinema/Wim-Wenders-confesse-le-pape-Francois-1572776

https://www.ladepeche.fr/article/2018/09/09/2865396-cinema-wim-wenders-sous-le-charme-du-pape-francois.html

https://culturebox.francetvinfo.fr/cinema/documentaire/le-pape-francois-un-homme-de-parole-wenders-se-noie-dans-un-film-de-commande-278975