C’est sans doute l’intervention du pape François devant la Curie romaine qui a provoqué, en cette fin d’année, le plus de commentaires, plus ou moins bien inspirés, du moins à mon goût. Car avant de tirer des conclusions ou d’envisager certaines conséquences d’un texte, il conviendrait de le considérer d’abord pour lui-même. C’est ce que j’ai essayé de faire le lendemain même de sa publication. Pardon, mais le Pape n’a pas du tout parlé de la réforme de la Curie ! Il aurait pu le faire en évoquant les travaux en cours de la commission cardinalice appropriée. Il aurait pu évoquer, par avance, les efforts qui devront être consentis avec la refonte des dicastères, l’adaptation aux missions nouvelles du Saint-Siège. Il n’a rien fait de tout cela, préférant se concentrer sur une méditation spirituelle, de facture assez rude, je le reconnais. Le style et le contenu étaient plutôt appropriés au cadre d’une récollection ou d’une retraite.
Mon premier réflexe a été d’incriminer la formation ignatienne de notre Pape, avec tout ce que les exercices spirituels peuvent nous suggérer. C’est d’ailleurs à un examen de conscience très élaboré que François a procédé et qui pouvait s’appliquer à l’ensemble du corps ecclésial. D’ailleurs, c’est ce qui est dit explicitement en fin de texte : « Frères, de telles maladies et de telles tentatives sont naturellement un danger pour tout chrétien et pour toute curie, communauté, congrégation, paroisse, mouvement ecclésial. Et elles peuvent frapper au niveau individuel ou communautaire. » Cela n’a pas empêché certains de définir ce discours comme une attaque directe contre l’institution curiale, dont la vacuité spirituelle aurait été mise à nu. Il ne m’est pas possible de contredire totalement cette interprétation, car il y avait dans cette exhortation quelques reproches transparents et l’on sait que la raison principale de la renonciation de Benoît XVI est venue d’une série de scandales et de la difficulté d’une réforme. Pour autant, il serait d’une injustice criante de mettre tant de bons et fidèles serviteurs dans le même panier, si j’ose dire. C’est pourquoi, je tiens à l’interprétation directe de cette allocution qui appelle à une conversion générale, à laquelle François ne se soustrait pas lui-même.
Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 30 décembre 2014.