Du voyage du pape François en Roumanie, on retiendra de belles images, avec notamment ces rassemblements de fidèles dans un pays où le catholicisme est pourtant minoritaire. S’il faut choisir un moment particulièrement significatif, c’est sans doute la béatification des sept évêques greco-catholiques roumains que l’on retiendra, car leur exemple n’est pas si lointain. Il se rapporte à la persécution subie par les greco-catholiques de la part du régime communiste entre les années cinquante et soixante-dix. À cette époque, dans les pays occidentaux on parlait d’Église du silence pour désigner les chrétiens en butte aux persécutions. Bien sûr, ils étaient condamnés au silence par le régime. Mais malheureusement, on faisait aussi trop souvent silence à leur propos dans nos pays libres, lorsqu’on ne célébrait pas les mérites d’un communisme libérateur. Notamment du côté des intellectuels frappés par un étrange opium mental, à l’époque bien défini par Raymond Aron.
Mais ce n’est pas tellement le rappel de cet aveuglement qui me touche. J’ai été ému face à cette grande foule de catholiques assistant à la béatification de ces héros de la foi, parce que cette foule était aussi héritière d’un héroïsme populaire et il devait y avoir en son sein des hommes et des femmes qui avaient eux-mêmes subi la persécution et qui n’avaient pas bronché dans leurs convictions. Le Saint-Père leur a rendu hommage, en rappelant que leur fidélité avait bravé les siècles : « Ici à Blaj, terre de martyre, de liberté et de miséricorde, je vous rends hommage, à vous fils de l’Église greco-catholique qui, depuis trois siècles, témoignez avec ardeur apostolique de votre foi. » Et ce n’est pas un message de ressentiment qui se dégage des persécutions subies, mais conformément à la parole des martyrs eux-mêmes, un appel à la miséricorde et à vaincre la rancœur par la charité et le pardon.
Toutefois, François a tenu à marquer aussi que si le système idéologique totalitaire et coercitif d’hier avait disparu, les chrétiens avaient à combattre de nouvelles colonisations idéologiques. Celles qui déprécient « la valeur de la personne, de la vie, du mariage et de la famille et qui nuisent, par des propositions aliénantes, aussi athées que par le passé, surtout à nos jeunes et à nos enfants en les privant de racines pour grandir ». Un avertissement à méditer sérieusement !
Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 3 juin 2019.
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