Le pape émérite Benoît XVI craignait pour son successeur ce voyage en Irak, considéré à risque, en dépit de toutes les précautions prises par les autorités du pays. Mais François tenait à tout prix à cette visite-pèlerinage, à laquelle Jean-Paul II avait dû renoncer à l’occasion du Jubilé de l’an 2000. C’était aussi pour François revenir sur les pas d’Abraham, père des croyants, mais encore au lieu de tant de souffrances endurées par les chrétiens et tous ceux, musulmans, qui subirent les effets de la déstabilisation de la région, dont l’implantation de Daesh. Je ne puis m’empêcher de me souvenir que la première guerre du Golfe déclenchée par les Américains en 1990, avec l’appui de 35 États, n’avait pas été approuvée, bien au contraire, par Jean-Paul II, en dépit de l’hostilité générale à l’égard du régime de Saddam Hussein.
Rétrospectivement, on ne peut que rendre témoignage au saint pape polonais de sa lucidité. Sans doute, sa mission est-elle associée à la cause de la paix, mais il avait probablement l’intuition des dégâts d’une guerre qui produirait la déstabilisation de la région. François n’a pas d’autre langage, alors qu’il veut espérer la consolidation de la paix, qui n’est d’ailleurs pas totalement revenue. Il reprend aussi l’héritage de son prédécesseur, qui avait suscité les rassemblements d’Assise, pour associer tous les responsables de bonne volonté au refus des affrontements interreligieux. De ce point de vue, la rencontre du pape avec l’ayatollah Ali al-Sistani, une des plus hautes autorités chiites est un événement de grande portée. Mais il faudra prendre toute la mesure de cette visite en Irak, avec en premier lieu le réconfort apporté à une communauté chrétienne très éprouvée.