La visite que le Pape vient d’accomplir en Roumanie laissera de beaux souvenirs à ceux et à celles qui ont eu la chance de participer aux grands rassemblements populaires auxquels elle a donné lieu. Pouvait-on imaginer qu’il y aurait des assemblées aussi denses dans un pays où l’Église catholique est très minoritaire ? Cette situation n’a pas été sans effet dans le passé, où les contentieux de la cohabitation parfois pesaient lourd, notamment lorsque le régime communiste a voulu abolir la communauté gréco-catholique en l’intégrant de force dans l’orthodoxie.
Le souvenir de la persécution d’après-guerre est encore très présent avec celui des sept évêques martyrs que François tint à béatifier là où ils donnèrent leur ultime témoignage. Il convient de rappeler à ce propos les liens que l’Église en France a gardés avec la chrétienté roumaine, en raison de la forte personnalité de Mgr Ghika, ordonné pour le presbyterium de Paris et qui termina, lui aussi, sa vie dans une prison du régime, après avoir été condamné pour haute trahison. Battu au sang, torturé, il devait mourir, octogénaire, des mauvais traitements qu’il avait subis.
Le bienheureux Vladimir Ghika, combattant contre les totalitarismes, aussi bien le nazisme que le communisme, est aussi une figure de l’œcuménisme, du fait de son origine orthodoxe. Devenu prêtre catholique, il n’avait rien oublié de l’Église de son baptême et il plaidait ardemment en faveur de l’unité. Plus de soixante ans après sa mort, la visite du Pape en Roumanie permet de comprendre son message et elle le fait revivre.
Dans l’avion de son retour à Rome, François a insisté sur la cordialité de la rencontre avec le patriarche Daniel, chef de l’Église orthodoxe roumaine. « Un homme au grand cœur, un grand érudit qui connaît la mystique des Pères du désert… un homme de prière. » Précisément, est-il permis de prier ensemble entre catholiques et orthodoxes ? Le Pape et le Patriarche avaient prononcé séparément le Notre-Père, l’un en latin, l’autre en roumain. Mais pour François, il était évident que les fidèles priaient bel et bien ensemble dans la cathédrale orthodoxe de Bucarest.
Le drame de l’humanisme athée
Mieux encore, la béatification des sept évêques martyrs à Blaj, loin d’être une occasion de ressentir les souffrances de la division, constituait une chance de « charité et de pardon » conformément à la parole même des bienheureux. On notera que le Pape a tenu, dans son homélie, à faire un lien explicite entre l’athéisme officiel du régime communiste et celui qui, aujourd’hui, mutile gravement, surtout aux yeux des jeunes et des enfants, « la valeur de la personne, de la vie, du mariage et de la famille ».
Le déni de Dieu et de sa présence dans la cité n’est pas seulement le lot des idéologies passées, il est aussi menaçant dans un monde où la foi se trouve refoulée. Nous n’en avons pas fini avec « le drame de l’humanisme athée ».
Pour aller plus loin :
- Vladimir Ghika : le contexte politique avant la guerre de 1914-1918
- LE MINISTERE DE MGR GHIKA EN ROUMANIE (1940 – 1954)
- Le défi du développement des peuples et le pacte de Marrakech - la fuite en avant des Nations Unies
- La paternité-maternité spirituelle en vie monastique est-elle menacée en Occident ?
- Dénoncer les abus sectaires dans la vie consacrée et passer l’épreuve en union au Christ Epoux