Pascal Bruckner, que je dois rencontrer aujourd’hui pour un débat sur l’état actuel du mariage, vient de publier un essai très stimulant (chez Grasset) dont le titre à lui seul constitue une provocation bien intéressante: « Le mariage d’amour a t-il échoué? »
En deux mots, la question consiste à s’interroger sur l’éclatement actuel du mariage, sensible au taux considérable des divorces, et même sur son effacement relatif, à l’heure où il est de plus en plus concurrencé par le pacs.
Et pourtant, notre civilisation semblait avoir franchi une étape décisive en abandonnant ce qu’on appelait le mariage de convenance au profit de l’union fondée sur la seule inclination réciproque.
J’ajoute que l’Eglise a joué un grand rôle dans cette évolution, en inventant un sacrement qui suppose le consentement plénier des époux, à l’encontre de toutes les pressions extérieures. Des pressions qui, lorsqu’elles sont patentes, peuvent justifier une déclaration de nullité par l’officialité diocésaine. Mais c’est une longue histoire, dont Michel Rouche est pour nous le spécialiste le plus aigu et le mieux informé. Et pourtant, attention! Le sentiment est éminemment fragile, explique Bruckner, il est aussi onéreux et parfois dangereux. A tel point que notre essayiste met en cause la formule de « la civilisation de l’amour », qu’il attribue à tort à Benoît XVI.
Oui, cher Pascal Bruckner, vos raisons sont solides, mais prenez garde: l’amour, dont se réclame le christianisme, est d’une essence particulière, très à distance de ce que Marcel Proust aurait appelé les intermittences du cœur.
Chronique lue sur Radio Notre-Dame le 28 septembre 2010.