Préoccupé par le Synode extraordinaire et les manipulations auxquelles il a donné lieu, je n’ai pu encore saluer la béatification de Paul VI, comme je le souhaitais. Le pape François, en parlant de lui comme du grand timonier du Concile, a dit l’essentiel. En effet, le grand œuvre de Jean-Baptiste Montini aura été Vatican II, qu’il a mené jusqu’à son terme, après en avoir été un des concepteurs principaux. On n’a pas assez souligné que Jean XXIII en avait fait son conseiller très proche, habitant le palais pontifical, lors de la première session du Concile. Le pape Jean avait eu l’intuition fondatrice, Paul VI la convertit en un programme ambitieux qui fut complètement respecté pour aboutir au corpus doctrinal que l’on connaît. Ou plutôt que l’on ne connaît pas assez.
J’ai entendu plusieurs fois, ces jours derniers, qu’il avait été un pape discret. L’expression m’étonne un peu, car ce n’est pas le souvenir que j’en ai gardé. Non que je doute de son humilité et tout autant de la discrétion qui fut la sienne, alors que la crise des années soixante l’accablait. Dès les années cinquante, celui qui avait été le collaborateur le plus proche de Pie XII était universellement connu. Successeur de saint Ambroise au siège prestigieux de Milan, là où saint Augustin se convertit, il se montre pasteur digne de sa fonction. Il est vraisemblable que s’il avait été déjà cardinal au conclave de 1958, c’est lui qui aurait directement succédé à Pie XII. Et en 1963, son élection était acquise d’avance.
C’est qu’il avait les qualités éminentes requises pour diriger l’Église à ce moment crucial où elle s’interrogeait sur sa mission dans la civilisation du XXe siècle. Paul VI mit tous les atouts de son côté pour opérer les meilleurs choix. Ainsi, il distingua notre compatriote, l’économiste François Perroux, pour le conseiller dans la rédaction de son encyclique Populorum progressio à propos du développement du Tiers Monde. C’est vrai qu’il fut décontenancé par ce qu’on appelle la crise des sixties, qui touchait aussi bien la société occidentale que l’Église. Mais il était des générations précédentes, qui ne se reconnaissaient pas dans cette culture qui bouleversait les mentalités et les mœurs. Pourtant, Vatican II avait préparé les armes doctrinales et spirituelles adaptées à un défi qui correspondait à un véritable renversement au XXe siècle.
Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 21 octobre 2014.
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Intervention de Gérard Leclerc sur LCI à propos du Synode et de Paul VI.