« Le fruit d’une longue prière » - France Catholique
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« Le fruit d’une longue prière »

Depuis cinq siècles, de nombreux compositeurs se sont emparés des Sept paroles du Christ en Croix. Entretien avec Olivier Bardot, fondateur du chœur Stella Maris, professeur au Conservatoire supérieur de Paris.
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Les compositeurs qui ont mis les Sept paroles en musique ont attendu d’avoir atteint la maturité pour le faire.

Les compositeurs qui ont mis les Sept paroles en musique ont attendu d’avoir atteint la maturité pour le faire.

© Larisa-birta / unsplash

Dans quelle mesure ces Sept paroles se prêtent-elles à une mise en musique ?

Olivier Bardot : L’exercice est périlleux puisque le compositeur s’empare d’un thème au centre de la sacralité chrétienne. On ne peut mettre en musique n’importe comment le moment où l’univers entier bascule ! Ces Sept paroles ont toujours été approchées avec respect, si ce n’est même une forme de vénération.

Les compositeurs attendent d’avoir atteint la maturité pour les mettre en musique, comme s’ils touchaient un objet extraordinairement sacré. Leur choix de s’attaquer aux Sept paroles est le fruit d’une longue prière, d’une longue intériorisation et de la méditation de la Parole.

Il faut dire que ces paroles répondent à des questions existentielles, à la fois éminemment spirituelles et proches des préoccupations quotidiennes des gens : l’abandon, la solitude, la confiance – « Femme, voici ton fils » –, les nécessités humaines – « J’ai soif » –, le pardon et l’amour – « Père, pardonne-leur car ils ne savent pas ce qu’ils font ». Ainsi, la musique telle qu’elle a été abordée par les différents compositeurs agit comme une caisse de résonance pour créer un pont entre le Ciel et la terre.

Quand est apparu ce motif des Sept paroles ?

Cette apparition est relativement tardive, et concomitante de la naissance de l’opéra et de l’oratorio, au XVIIe siècle. Auparavant, ce thème était considéré comme trop « théâtral » pour être mis en musique, thèse confirmée par le concile de Trente (1545-1563). Ce concile codifia strictement la mise en musique et la théâtralité dans la musique sacrée, qui devaient être au service de la liturgie de l’Église.

Cette régulation avait un double objectif : d’une part, faire cesser les abus dans la superposition intempestive de plusieurs textes dans la polyphonie, qui avait pour effet de rendre inintelligible leur sens ; d’autre part, imiter le choral luthérien dans sa verticalité pour mieux contrecarrer son influence, et créer en quelque sorte un « choral catholique ». Les obligations tridentines ont pourtant presque aussitôt été contournées par les compositeurs !

Un compositeur fait-il figure de précurseur ?

L’un des premiers est probablement Tomás Luis de Victoria (v. 1548-1611), qui vécut à la frontière de la Renaissance et du baroque. Il aborde les Sept paroles dans ses Répons de ténèbres, composées en 1585 de manière extrêmement sobre, sous la forme d’un chœur à quatre ou cinq voix, selon la tradition madrigalesque de l’époque. Victoria adopte une forme très simple où l’on entend très bien le texte parce que toutes les voix suivent le même rythme, le tout avec très peu de contrepoint, de distance et d’affect.

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