En octobre 2005 la RAI, télévision nationale italienne, proposait une production à grand spectacle de la « Lux Vide » sur la vie de saint Pierre, réalisée par Giulio Base. Composée de deux parties de plus d’une heure et demie chacune, divisées en multiples chapitres, elle eut alors une audience estimée à 16 millions d’Italiens.
Douze ans plus tard, voici ce film enfin disponible en français grâce à la société de diffusion SAJE, sous forme d’un coffret DVD qui reprend les deux grands épisodes entièrement doublés dans notre langue.
La première partie suit fidèlement les évangiles en se concentrant sur la première rencontre du pêcheur Simon avec Jésus et sur le récit de la Passion et donc de la trahison de Simon que le Christ avait baptisé Pierre parce qu’il comptait bâtir son Église sur lui. Après un moment d’égarement, le premier apôtre voit le tombeau vide. Et Jésus ressuscité lui apparaît plusieurs fois. Il devient alors un prêcheur sans peur et sans reproche et l’on sait les miracles qui accompagnent le formidable essor que connaît l’Église de Jérusalem malgré les persécutions organisées par les juifs pieux dont un certain Saul. La conversion de ce dernier sur le chemin de Damas et son engagement auprès de Pierre constituent la fin du premier film qui s’appuie sur la force même de la composition du récit des évangiles, dont on oublie parfois qu’ils sont aussi une œuvre littéraire inégalée dont on peut donc tirer — qu’on soit croyant ou non — des œuvres d’art très fortes — celles qui constituent l’essentiel de notre culture — même si ce n’est pas toujours le cas.
Le deuxième film a moins de bases scripturaires. Paul se sent en difficulté à Rome pour témoigner car il n’a pas connu le Christ directement, et il décide de faire appel à Pierre qui, vieillissant, serait bien resté chez lui à Capharnaüm… Finalement Pierre se met en route et arrive à Rome au moment précis où Paul est décapité. Voilà Pierre chef de la communauté des chrétiens de Rome et c’est à ce titre qu’il est arrêté après l’incendie de Rome par Néron qui fait accuser les chrétiens. Le film suit la tradition selon laquelle le premier pape est crucifié la tête en bas et le film s’achève sur une vision de la place Saint-Pierre pleine de pèlerins modernes.
Ce deuxième film comprend plusieurs histoires plus romanesques avec un jeune couple d’amoureux déchirés, un gladiateur-terminator chrétien, un sénateur machiavélique mais bon fils et bon père… qui sont des digressions plutôt sympathiques destinées à combler le vide du texte sacré et qui ne sont pas pour rien dans le succès populaire de cette « saga » en Italie. Les acteurs sont beaux — le Christ est certes un peu ectoplasmique mais comment faire autrement ? — les caractères sont bien marqués, les dilemmes moraux dignes de Quo Vadis ou Ben-Hur. La reconstitution historique à la hauteur d’un bon péplum avec un grand nombre de figurants et des décors de carton-pâte certes, mais qui restent dans la limite de la crédibilité. Après tout il ne s’agit pas d’un documentaire scientifique mais d’une fiction historique qui évoque la vie du premier pape… Le doublage en français est honnête également. De toute manière, nous Français, nous ne sommes guère capables d’accéder aux films étrangers en version originale, sauf pour les publics les plus avertis et les plus jeunes qui sont beaucoup plus sensibles à l’authenticité des voix des acteurs, surtout quand il s’agit de grands acteurs.
En l’occurrence nous avons affaire au plus grand acteur qui soit, et spécialement à une grande voix, Omar Sharif, sur qui repose toute la crédibilité du film. Et il s’en sort d’une manière admirable. L’histoire est ponctuée par des récitations du Notre Père qui sont, à chaque fois, de grands moments d’émotion communicative. Et Omar Sharif, qui avait alors 73 ans, déclara, un dimanche après-midi sur la RAI consacré à la sortie de cette série : « Lorsque je récitais le Notre Père, j’étais dans un autre monde, je ne pensais plus à ce qui était autour de moi, je pensais à ma rencontre avec Jésus ». Cela crève l’écran. Oui le film a sans doute ses défauts propres notamment au genre télévisuel, mais l’acteur qui incarne saint Pierre, celui que l’on connaît par les magazines « people » comme un séducteur et un joueur impénitent, est ici manifestement empli du Saint-Esprit. On ne pourra oublier son regard plein d’amour et son sourire plein d’une infinie douceur. Ce long feuilleton consacré à saint Pierre, prenez-le comme un moment de détente agréable avec des rebondissements dramaturgiques propre à soutenir l’attention, mais vous pourrez aussi en faire une retraite spirituelle car il dit tout sur ce que le Christ réclame à ses disciples, en montrant que c’est possible même dans les pires circonstances.
Pour aller plus loin :
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- QUAND LES FRÈRES S’IGNORENT
- Liste des ouvriers pastoraux, Evêques, Prêtres, Religieux, Religieuses et Laics tués en 2011 et 2010
- La France et le cœur de Jésus et Marie