Le gouvernement a tiré hier les premières conclusions du débat sur l’identité nationale, mené par Eric Besson, en charge du ministère de l’Immigration. On sait que cette initiative s’est trouvée très vite dénoncée par beaucoup qui craignaient ou même qui annonçaient qu’elle donnerait lieu à des débordements xénophobes et à des manifestations d’intolérance notamment contre l’Islam. Reconnaissons que ce grief n’était pas imaginaire et qu’en bien des endroits il y a eu des dérapages. Fallait-il pour autant exclure par principe ce débat? Personnellement je ne le pense pas, pour une raison essentielle. Avant même qu’elle ne soit officiellement débattue, la question de l’identité nationale était posée dans les esprits. Elle ne l’est d’ailleurs pas seulement en France, elle l’est dans tous les pays européens qui ont à gérer une immigration étrangère. Compte tenu d’une démographie défaillante, cette dernière bouleverse les données du « vivre-ensemble » et de la culture commune. Ne pas le voir c’est se boucher les yeux.
On peut certes s’alarmer contre ce qu’on appelle des manifestations d’intolérance, et dénoncer l’attitude des Suisses rejetant massivement la construction des minarets. Il serait peut-être plus judicieux de tenter de comprendre sérieusement pourquoi les gens ont peur; peur d’être dépossédés de leur propre identité par des populations venues d’ailleurs et qui, forcément, apportent chez nous d’autres mœurs, d’autres façons de s’habiller, voire de prier. Fermer obstinément les yeux devant de tels phénomènes, c’est prendre le risque d’attiser les peurs et les réactions de rejet. Il faut parfois avoir le courage de mettre en évidence ce qui ne marche pas, au risque de toucher, comme disait Charles Péguy, là où ça fait mal.
Il faut aussi avoir le courage de dire que les choses ne sont pas simples et qu’il est dangereux de se laisser aller à des attitudes manichéennes. Prenons l’Islam, par exemple. Je me suis moi-même attiré des reproches de la part de ceux qui prônent une attitude de crainte et de rejet à son égard, lorsque j’ai salué ici-même la visite du Président de la République au cimetière de Notre-Dame de Lorette, dans le carré des musulmans morts pour la France. Je maintiens que cette visite était nécessaire et bienvenue à l’égard de nos compatriotes musulmans, d’abord parce que les tombes de ce carré avaient été profanées, ensuite parce que c’est bien le minimum quand on parle d’identité nationale de rappeler le sacrifice de tous ces musulmans venus d’Afrique du Nord combattre pour la patrie et mourir pour elle. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas de problèmes avec l’Islam. J’ai aussi remarqué ici même que des difficultés de cohabitation étaient renforcées dans des pays en voie de déchristianisation parce qu’une identité chrétienne mal assumée et donc fragilisée, donne lieu à des phobies qui sont beaucoup plus difficiles à canaliser et à contrer.
Il me semble donc, pour conclure trop rapidement, que malgré ces défauts, ce débat était nécessaire et qu’il ne fait d’ailleurs que commencer. Reste à espérer qu’il se civilise parfois, qu’il s’approfondisse, et qu’en définitive il permette de renforcer l’unité nationale au lieu de diviser. J’attends sereinement qu’il se poursuive dans l’intérêt de la paix et d’une plus grande amitié commune.
— –
Eric Zemmour sur RTL : "Waterloo sur l'identité nationale"
envoyé par rtl-fr. – Regardez les dernières vidéos d’actu.