Le danger du lynchage - France Catholique
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Le danger du lynchage

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Le chroniqueur doit-il forcément s’emparer du sujet vedette du jour, celui qui déchaîne les médias, surchauffe les commentaires, invite les grandes consciences à trancher noblement et non moins définitivement ? Parfois, il faut s’imposer le retrait, la distance, ne serait-ce que pour échapper à ce qu’on pourrait appeler « l’effet de meute ». Bien sûr, il ne faudrait pas trop se réfugier dans l’abstention. Ce pourrait être au risque de la lâcheté. Enfin, qu’on me permette un bout de confession. J’ai très peu parlé de l’affaire DSK, quand le scandale a éclaté. Et depuis, je me suis totalement abstenu de commenter les périples judiciaires de l’ancien directeur du FMI. Pour une raison simple : on ne frappe pas un homme à terre. Cela n’empêche pas les confrères de faire leur métier et de rendre compte d’une actualité qu’il faut aborder dans toutes les règles de la déontologie. J’ai même des amis qui ont su traiter l’affaire sur un plan supérieur, qui excluait les procédés du lynchage.

Lynchage, voilà le vilain mot qui s’impose, au vu de cette autre affaire qui a brusquement explosé, bien qu’on dise, ici ou là, que c’était secret de polichinelle. C’est d’ailleurs une partie du problème : il y a l’omerta, et puis brusquement la parole se libère et c’est le déchaînement. On me dira que ce n’est que justice et que le personnage découvert n’a que ce qu’il mérite. Mais il n’y a pas que lui, il y a sa famille, son épouse, éventuellement ses enfants. Et puis je ne suis pas convaincu que le traitement médiatique du mal soit la façon la plus appropriée d’appréhender ce genre de pathologie. N’y avait-il pas des responsables, des proches, des amis qui auraient pu recadrer le présumé délinquant, en lui expliquant comment il se fourvoyait et risquait de gâcher sa vie.

J’entends par ailleurs une nouvelle explosion de la fureur féministe, qui s’expose en des colonnes entières, avec des philippiques d’une agressivité impressionnante. Tant de luttes des femmes auraient donc abouti à l’échec ? C’est vrai qu’on nous dit qu’il s’agit d’une bataille titanesque contre des effets de domination surgis de la nuit des temps. Mais on peut entendre aussi une autre voix, celle d’Eugénie Bastié, auteur d’un essai stimulant, Adieu mademoiselle. La défaite des femmes, aux éditions du Cerf : « Jamais les filles n’ont été autant traitées de putes et de salopes dans les cours de récréation » déclare-t-elle au Point. N’y aurait-il pas là un échec flagrant du féminisme, qui exige d’urgence qu’on en examine les causes ?

Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 12 mai 2016.